mercredi 30 avril 2014

Japon, jour 21 - Le Mont Fuji... ou pas

La petite montagne d'hier ne nous ayant pas suffi, ce mercredi aurait dû être consacré à une excursion au Mont Fuji. Notez l'emploi du conditionnel passé... Nos billets de bus étaient bien réservés pour 9h40, mais nous avons mal évalué le temps nécessaire pour nous rendre de notre hôtel au terminal des bus à Shinjuku. Au final, nous sommes arrivés avec 20 minutes de retard, et le bus ne nous avait évidemment pas attendus. Une chance dans notre malheur, les billets devaient être payés en liquide à la montée dans le bus ; nous n'avons donc pas à pleurer la disparition en fumée de 10 000 yens. D'ailleurs, la première déception passée, nous finissons par nous dire que ce changement de programme n'est pas si grave : il pleut toujours beaucoup, et il m'a suffi de traverser trois rues à Shinjuku pour avoir les pieds dans l'eau. Vu le temps, le Mont Fuji aurait sans doute été invisible, voire très désagréable à explorer.

Etant arrivés tard d'Hiroshima hier soir (notre avion avait une demi-heure de retard), nous décidons donc de retourner à l'hôtel pour récupérer un peu de sommeil. Requinqués par une bonne sieste de trois heures, nous optons pour le genre de visite que nous ne faisons jamais d'habitude quand nous découvrons une ville/un pays étranger : le Sumida Aquarium, situé aux 4è et 5è étages de la tour de télévision Tokyo SkyTree. Quitte à être entourés par de l'eau, autant que ce soit avec des poissons dedans !

En fait de poissons, les pensionnaires les plus intéressants de l'aquarium sont les pingouins (les soigneurs leur servent à goûter quand nous arrivons) et les otaries, aussi bavards les uns que les autres. Inutile de s'étendre pendant des paragraphes sur la visite, tout le monde sait à peu près à quoi ressemble un aquarium, ça ne change pas beaucoup suivant les différents pays du monde !




Cette visite à la Tokyo Sky Tree est surtout l'occasion de découvrir enfin les crêpes à la japonaise (réponse : vous mettez à peu près tout ce que vous voulez dedans, du moment que les saveurs ne clashent pas trop) et de faire un peu de shopping. Les magasins avec des noms français (parfois trèèèès approximatifs) sont à la mode, à croire que ça fait plus classe...

Rien de plus excitant à rapporter aujourd'hui, donc, mais au moins, nous aurons rechargé les batteries pour les deux jours à venir.

Des photos loin d'être exotiques !

mardi 29 avril 2014

Japon, jour 20 - Hiroshima/Miyajima

S'il n'y a qu'une seule chose à visiter à Hiroshima, c'est bien le Peace Memorial Park et le musée qui va avec. Ça tombe bien, les deux sont situés à 500 mètres de notre hôtel. Nous commençons donc cette nouvelle journée grise et pluvieuse par le parc... et il ne nous faut pas bien longtemps pour avoir de vilaines poussières dans les yeux.

Le Peace Memorial Park a été aménagé à l'épicentre de la bombe, dans une zone qui fut totalement et instantanément rasée le 6 août 1945 à 8h15 du matin. Il regroupe plusieurs sites très émouvants, à commencer par un grand tombeau qui abrite le registre de toutes les victimes de la catastrophe, qu'elles soient mortes le jour-même ou dans les jours/semaines/mois qui ont suivi. Juste derrière brille la flamme du souvenir, et dans le fond, on aperçoit la carcasse du A-Bomb Dome, le seul témoin de la bombe encore debout aujourd'hui (160 mètres de l'épicentre). Il n'en reste qu'une structure métallique carbonisée, des murs en ruine et une grosse, grosse aura de déprime.



Dans le parc, on trouve également le Monument des enfants pour la paix, dédié à Sadako, une petite fille morte à 12 ans d'une leucémie causée par les radiations. Une tradition japonaise veut que, si on parvient à plier 1000 grues en papier, un vœu sera exaucé. Espérant guérir, Sadako commença à plier ses grues mais n'arriva jamais à bout des 1000. Les enfants de sa classe firent ériger un monument en mémoire des enfants victimes de la bombe atomique, et aujourd'hui encore, les gens du monde entier apportent des grues en mémoire de Sadako. Ce n'est plus de la poussière que nous avons dans les yeux, ce sont des gravillons de jardin zen.



Histoire de bien enfoncer le clou, nous nous rendons au Peace Memorial Museum, un musée fascinant (dans le genre pas marrant du tout) qui explique avec un luxe de détails le rôle du Japon dans la guerre, les raisons qui ont poussé les Américains à choisir Hiroshima pour leur premier test de bombe atomique à taille réelle et le fonctionnement des bombes A et H. On y découvre aussi, évidemment, des témoignages, des photos et des reconstitutions de « ce jour-là », comme disent encore les habitants de la ville. Au bout d'un moment, la boule dans la gorge se fait telle qu'on passe sans s'arrêter devant les vêtements tachés de sang et les objets personnels en miettes de ces adolescents qui ont agonisé pendant trois jours avant de mourir de leurs brûlures. On passe aussi très vite devant les explications scientifiques des effets des radiations sur le corps humain, parce que franchement, on préfère en savoir le minimum.



Le Peace Memorial Museum est vraiment passionnant, mais nous ne sommes pas fâchés d'en sortir pour respirer un peu plus légèrement. Rien de tel que le grand air pour oublier un peu toutes ces horreurs ; nous nous rendons donc à quelques kilomètres de là, sur l'île de Miyajima, célèbre pour son sanctuaire marin. Dix minutes de ferry nous conduisent sur une île à peu près aussi touristique que le Mont-Saint-Michel par chez nous. Cela dit, on peut comprendre l'attrait du coin : le sanctuaire d'Itsukushima, bâti sur pilotis, et son torii rouge géant au milieu de l'eau sont vraiment superbes.



Pour avoir une vue globale sur l'île et la baie d'Hiroshima, l'idéal est de monter au sommet du Mont Misen. La plupart des gens optent pour le téléphérique, mais les barjos préfèrent le sentier forestier de 2,5 km (le double avec le retour, forcément). Et comme nous sommes de parfaits imbéciles, nous préférons l'option la plus longue et la plus douloureuse. Il faut vraiment être idiots pour s'attaquer à un sentier pareil après trois semaines de visites non-stop, à midi et sans rien dans l'estomac depuis le petit-déjeuner... Après une heure d'escaliers particulièrement raides, nous voici enfin parvenus à l'observatoire du Mont Misen, d'où on a une vue imprenable sur les petites îles qui émaillent la baie et les nuages très, très bas qui recouvrent les montagnes.



La descente est presque pire que la montée, car à 14h passées, nous commençons vraiment à mourir de faim. Heureusement que nous croisons quelques daims, une cascade et des temples perdus au milieu des arbres pour compenser ! De retour au sanctuaire, la glycémie en négatif, les jambes en coton et le cœur à 200, nous nous jetons sur le premier restaurant venu pour un déjeuner bien mérité et nous accordons même une glace sur le chemin du ferry. Pas de scrupules après deux heures de marche aussi intensive !


Cette journée marque la fin de notre road-trip. Ce soir, nous abandonnons enfin la voiture (qui nous a rendu de fiers services, mais tous les dieux savent qu'elle nous aura aussi exaspérés, avec son GPS caractériel et les parkings qui ont grignoté la moitié de notre budget) pour prendre l'avion à destination de Tokyo. Nous y passerons nos trois derniers jours, et vu le programme, on ne peut pas dire que le séjour soit terminé !

lundi 28 avril 2014

Japon, jour 19 - Himeji/Okayama

Pour changer un peu, ce matin, nous entamons notre découverte de Himeji (sous la pluie) avec un temple. Bon, ne soyons pas trop mauvaises langues, il ne s'agit pas non plus de n'importe quel temple : pour commencer, il n'est accessible qu'en téléphérique car il est situé au sommet d'une montagne. On ne veut même pas savoir comment les moines de l'époque pré-téléphérique se faisaient ravitailler... Et en deuxième lieu, pour les amateurs de Tom Cruise, c'est là que plusieurs scènes du film Le Dernier samouraï ont été tournées. Mais on ne peut même pas vous dire lesquelles, car l'une n'a jamais vu le film et l'autre ne s'en souvient pas !



Pour accéder au groupe de bâtiments qui constituent le monastère à proprement parler, il faut gravir une sacrée pente bordée de statues de Kannon. Nous nous sommes demandé à l'aller s'il y en avait bien 33. Au retour, nous avons compté : la réponse est oui. Quelques-unes comptent même un sacré paquet de bras... L'endroit est assez peu fréquenté, ce qui permet de faire la visite au calme, mais nous sommes un peu déçus par l'état des lieux. Tous les temples que nous avons visités depuis le début du séjour étaient immaculés, tirés à quatre épingles. Ici, peut-être parce que nous sommes en forêt, il y a un peu plus de laisser-aller et l'ensemble a un peu l'air négligé. Mais le temple principal construit sur pilotis, un peu comme le Kiyomizu-dera de Kyoto, vaut largement le détour.



Après avoir pris le téléphérique en sens inverse, nous nous rendons au château féodal Himeji-jo, un chef-d'œuvre d'architecture japonaise. Enfin, c'est ce que nous dit le guide... car le château est en rénovation jusqu'en 2015 et la tour principale disparaît sous de très vilains échafaudages. Impossible de profiter de la blancheur tant vantée de ses murs, donc, ou même de visiter la tour. Il faut nous contenter de la partie ouest du château, sorte de très long couloir qui servait à la fois de construction défensive et d'habitation. On en apprend beaucoup sur l'histoire du château et du clan qui le tint pendant environ 250 ans, mais cela ne compense pas vraiment la déception de ne pas pouvoir accéder au donjon principal.



La pluie qui s'intensifie nous fait presque regretter d'avoir opté pour un billet combiné avec le jardin Koko-en, à deux pas du château, mais une fois la visite commencée, on change rapidement d'avis. Koko-en se compose en fait de huit petits jardins dessinés sur le modèle des jardins des résidences de samouraïs. Il y a beaucoup d'eau, de petits pavillons, des cascades, de petits ponts so japonais... C'est juste chou comme tout et ça valait bien le coup de passer un peu plus de temps sous la pluie.



Après un déjeuner-supermarché désormais habituel, nous prenons la route d'Okoyama, à environ 1h30 d'Himeji. Là encore, c'est un combo château/jardin qui nous attend. Là où le château d'Himeji est tout blanc et vieux de quelques centaines d'années, celui d'Okoyama est tout noir (avec une pointe de doré) et a été rasé par les bombardements américains. Il a donc été reconstruit en 1966, en béton armé et avec un ascenseur. C'est tout de suite moins romantique, mais plus pratique si vous avez l'intention d'en faire un simple musée. On y découvre des objets ayant appartenu aux différents clans qui ont tenu le château, et on a même la possibilité de faire un petit tour dans un palanquin ou de faire joujou avec des armes de samouraï (fausses, les armes !).



Pour finir la journée en beauté, nous traversons la rivière pour nous rendre à Koraku-en, l'un des quatre plus beaux jardins du pays (dont le gardien est le chat le plus bavard et le plus râleur du monde connu, qui miaule comme un perdu même quand on le caresse). La vue change tout le temps, et pourtant, il y a une grande impression de continuité dans les différents paysages. Petite colline, étangs, rivière qui traverse un bâtiment, pont en bois zigzaguant, cascade... Tout ça a l'air très moderne alors que le jardin a été dessiné en 1700. Une jolie conclusion à cette journée.



Enfin, « conclusion », pas tout à fait, puisqu'il nous reste deux heures de route jusqu'à Hiroshima. Nous profitons de l'étape de ce soir pour déguster des okonomiyaki, la « pizza japonaise », spécialité de la région. A priori, nous avons maintenant fait le tour des spécialités culinaires du pays !

dimanche 27 avril 2014

Japon, jour 18 - Kyoto

Dernière journée d'exploration de l'ancienne capitale japonaise, avec un gros morceau pour finir en beauté ! Histoire de pouvoir dire que nous avons visité tous les principaux temples de la ville, nous commençons par nous rendre à Kodai-ji, fondé par l'épouse d'un shogun à la mort de son mari. Quand on veut entrer en religion dans son veuvage, autant créer son propre monastère, c'est vrai... Rien d'exceptionnel ici, seulement un très joli jardin et des bâtiments reliés par un corridor censé représenter un dragon endormi. On cherche encore à le distinguer, mais c'est normal, on n'a pas atteint l'illumination nécessaire pour ça.



Sur le chemin du retour à la voiture, nous croisons plusieurs femmes en costume et maquillage de geishas. Impossible de savoir s'il s'agit d'authentiques geishas, de simples apprenties ou, plus vraisemblablement, de jeunes femmes "déguisées" à l'occasion d'une séance photos dominicale, mais au moins, nous quittons Kyoto en ayant eu un aperçu du folklore !

Deuxième arrêt : To-ji, le principal centre de diffusion du bouddhisme Shingon avec les temples de Koya-san avant l'avènement de l'an mille. La pagode de 57 mètres, la plus haute du Japon, dévoile ses trésors pour une exposition temporaire. On peut ainsi confirmer que l'intérieur d'une pagode sert seulement à faire joli et à exposer les statues qui ne trouvent pas leur place dans les sanctuaires plus grands. Piliers, murs et plafonds sont intégralement peints et prouvent que la pagode a plus un rôle décoratif que strictement religieux.



Au bout de deux semaines, tous les temples finissent par se ressembler et le plus grand intérêt des visites se trouve ailleurs que dans les bâtiments ou les trésors qu'ils renferment. A To-ji, nous avons ainsi joué les amis de la nature en nous émerveillant devant le jardin et ses différents habitants. Maman canard et ses trois canetons sont sans doute la chose la plus adorable que nous ayons vue depuis le début du séjour. Que voulez-vous, on fatigue un peu, au bout de deux semaines aussi intensives...



Nous voici arrivés au gros morceau promis en introduction : Saiho-ji, le Temple des Mousses. Gros morceau parce qu'on n'y entre pas comme dans un moulin, et que la réservation est encore plus compliquée que pour tous les palais impériaux réunis. Tout se fait à l'ancienne, par courrier ; il faut envoyer une lettre des semaines à l'avance pour espérer avoir une place et joindre une carte timbrée pour recevoir la réponse à son adresse au Japon. Allez donc faire tout ça depuis Paris... Heureusement qu'une personne futée a eu l'idée de créer un service de réservation sur Internet pour aider le touriste. Vous lui envoyez un message, quelques sous, et hop, la confirmation vous attend à votre arrivée à Kyoto. Dimanche 13 heures, ce n'était pas notre premier choix, mais nous n'allons pas faire la fine bouche.

A l'arrivée au Temple des Mousses, déchaussage et "donation" de 3 000 yens par personne obligatoires. Ensuite, c'est comme à l'école : tout le monde est invité à s'agenouiller devant un tout petit bureau et à recopier une sutra. Tout en kanjis. Et au pinceau. Gloups ! Heureusement que le texte est pré-écrit et qu'il ne reste qu'à repasser dessus ! Une fois qu'on a compris comment marchait l'encre (pas de moqueries, ça n'avait rien d'évident !) et après quelques lignes (enfin, colonnes), on prend le pli. Là-dessus, au beau milieu du recopiage, les prêtres invitent les visiteurs à se joindre à eux pour la cérémonie et à réciter le mantra. Ben oui, mais en deux semaines, on n'a toujours pas appris à lire les kanjis, nous...


Toooout ça, qu'il a fallu recopier !


La copie de sutra au pinceau nous occupe une bonne heure, mais il n'y a pas de honte à avoir, car certains Japonais ont mis autant de temps que nous. Certains ont même honteusement triché en apportant dans leurs affaires un style-pinceau, mais ça ne les aura pas beaucoup aidés. En revanche, il faudra qu'on nous explique l'art de rester à genoux pendant une heure. Pour nous, cinq minutes, c'est déjà insurmontable ! Même assis en tailleurs, entre deux coups de pinceau, nous avons passé notre temps à bouger les jambes pour chasser les fourmis...

Après cette expérience unique, nous sommes enfin admis dans le jardin, qui fait tout l'intérêt du lieu. Abandonné à l'ère Meiji, le jardin a alors développé 120 variétés de mousses avant de revenir en grâce et d'être laissé en l'état. Après la sutra, personne n'ose parler trop fort et l'endroit est donc d'un calme un peu surnaturel. Les mousses aux teintes vertes variées recouvrent vraiment tout, y compris le fond de l'étang où les carpes ont un peu de mal à se dépatouiller. Au final, l'exploration du jardin prend à peine une demi-heure, et la vraie expérience de la visite réside sans aucun doute dans la partie religieuse !



Après cinq jours à Kyoto, nous voici on the road again pour l'une des dernières étapes de notre road-trip, Himeji. Pour être honnête, nous ne sommes pas fâchés de laisser Kyoto derrière nous, car même si la ville est d'une infinie richesse, nous en avons plus qu'assez de la conduite à l'indienne, des parkings aux prix prohibitifs et des feux rouges qui durent une semaine. Lâcher enfin la voiture ne nous fera pas de mal.

samedi 26 avril 2014

Japon, jour 17 - Kyoto

Nous sommes toujours à Kyoto et nous poursuivons la découverte des merveilles que compte cette ville. Et encore, uniquement les incontournables signalés dans le guide Michelin, sinon nous serions encore là la semaine prochaine...

Nous quittons notre hôtel un peu plus tard que d'habitude (ils avaient oublié notre petit-déjeuner...) pour nous rendre à Tofuku-ji. Encore un temple, oui, mais celui-ci a le mérite de posséder un très beau parc, presque une forêt, traversé par un pont de bois. On est perdu au milieu d'un océan de vert et seuls les toits des bâtiments dépassent de la cime des arbres. Au milieu de la forêt, un temple avec un beau jardin zen surnage, ainsi qu'un autre avec des jardins aux quatre points cardinaux. C'est joli comme tout et vraiment original.




A environ 15 minutes à pied (pour une fois qu'on trouve un parking gratuit, on en profite) se trouve le sanctuaire Fushimi-Inari Taisha. Là encore, ça pourrait n'être qu'un sanctuaire de plus, mais il y a une originalité. Une petite folie, même, d'ailleurs. Une heure plus tôt, à Tofuku-ji, nous avons repéré une série de 11 torii placés les uns à la suite des autres et plaisanté sur leur utilité. On ne rigole plus du tout, parce qu'ici, des torii, il y en a 30 000.




Minute culture pour comprendre de quoi il retourne. Inari, qui donne son nom au sanctuaire, est la déesse protectrice du riz. Autant dire que c'est un sacré big deal dans le coin et qu'il vaut mieux que la déesse soit de bonne humeur si on veut éviter les catastrophes façon famine de la patate en Irlande. Alors, pour s'attirer ses bonnes grâces, les fidèles lui font don de torii gravés à leur nom depuis le 8è siècle. Et ça continue aujourd'hui, même si lesdits fidèles ont plus tendance à réclamer de bonnes récoltes de sous que de bonnes récoltes de riz. Ergo, 30 000 torii de toutes tailles, du grand machin sous lequel on peut marcher au petit truc portable à bout de bras. "C'est quoi le délire avec les renards ?", vous demanderez-vous peut-être après avoir vu les photos. Réponse facile : le riz est la céréale préférée des rongeurs, et quoi de mieux qu'une paire de renards pour les tenir à l'écart ?




Un circuit plutôt escarpé et plein de marches zigzague dans la montagne sur 4 km et permet d'accéder au sanctuaire au sommet. Il faut être un brin cinglé pour l'emprunter par cette chaleur, voire pour l'emprunter tout court. Alors forcément, ni une ni deux, on l'emprunte. 4 km en montagne, ce n'est vraiment pas de tout repos, malgré l'ombre accordée par les torii. On admire particulièrement les papys-mamies qui font l'ascension sans paraître plus essoufflés que nous, ainsi que les très jeunes enfants qui ne se plaignent même pas de toutes ces marches. On a dû les prévenir qu'il y avait des stands de glaces un peu partout sur le chemin... Il nous faut un peu plus d'une heure et deux bouteilles d'eau pour atteindre le sommet, pour au final ne rien voir de plus de là-haut ! Tout l'intérêt du site réside dans la succession de torii, pas dans la vue depuis le sanctuaire.




Une fois redescendus (en moins d'une demi-heure, c'est fou comme c'est plus facile dans ce sens-là !), nous nous accordons un déjeuner bien mérité à base de brochettes de viande et de taiyaki, de petits poissons en pâte à gaufre fourrés à la crème pâtissière ou à la pâte de haricots rouges. Miam miam !

Notre dernière étape de la journée se trouve à une dizaine de kilomètres de là. Il s'agit d'un célèbre temple de l'école Shingon, Daigo-ji, consacré à Kannon (encore elle) et construit à l'emplacement d'une source d'eau aux pouvoirs spirituels (sans doute la version aquatique de l'herbe qui fait rigoler). On y découvre d'abord le plus beau jardin intérieur de tout notre séjour (mais forcément, pas de photos), puis un ensemble monastique avec pagode, petit étang adorable et temples disséminés ça et là. Nous avions bien l'intention de nous faire une thématique "crapahutage en montagne" et de gravir là aussi les 2,5 km qui mènent au sanctuaire, mais il faut mettre la main à la poche pour accéder au sentier de randonnée, et ça, ça nous énerve au plus haut point. Payer pour voir l'intérieur des temples ou entrer dans des jardins classés, pourquoi pas, mais pour approcher une cascade ou marcher dans la montagne, non merci.




Finalement, renoncer à la randonnée n'est peut-être pas un mal, car le simple retour à la voiture tire un peu sur les muscles... Ce soir, ce sera donc retour à l'hôtel assez tôt, pour nous préparer à notre dernière journée à Kyoto demain.

Après les chats, les renards !

vendredi 25 avril 2014

Japon, jour 16 - Kyoto

Une journée plus reposante qu'hier au programme ! Bien reposés, nous attaquons un autre gros morceau de patrimoine Kyotoïte. Après le Pavillon d'or il y a deux jours, voici le Pavillon... d'argent, Ginkaku-ji. Construit par le petit-fils du responsable du Pavillon d'or, il brille beaucoup moins que son modèle. Autant l'or se voyait bien, autant l'argent est plus métaphorique qu'autre chose. Le site vaut surtout pour son jardin zen très original (le cône de sable est une première, de même que l'agencement des traces de râteau) et pour son très joli jardin. Il y a presque autant de touristes que pour la version dorée, mais l'endroit est beaucoup plus agréable et moins tape-à-l’œil.



De Ginkaku-ji part un petit chemin que les locaux ont baptisé "Chemin de la Philosophie". Il s'agit d'une promenade ombragée qui longe le canal, avec de petits cafés-restaurants et des boutiques d'artisanat à intervalles réguliers. Sous les arbres, la chaleur devient beaucoup plus supportable (il faisait déjà 20° à 10 heures du matin), et on peut ainsi parcourir la quasi-totalité du chemin (environ 1,5 km) en toute tranquillité jusqu'au temple Nanzen-ji que nous avons visité hier. Parce qu'on ne fait pas plus philosophique que les chats, nous en croisons une flopée sur la route, qui ne demandent qu'à se faire caresser. Ça tombe bien, nous, on est en manque de félins !



Pour casser un peu la routine des visites, nous passons l'heure du déjeuner dans une partie de Kyoto beaucoup plus commerçante et urbanisée. Nous avons eu la chance de repérer un magasin proposant des produits liés à la cérémonie du thé et à l'art de l'ikebana tout près d'un cat-café : ce serait dommage de ne pas allier l'utile à l'agréable ! Le défi consiste à trouver les deux lieux sans pouvoir saisir la moindre adresse précise dans le GPS, mais grâce aux informations notées la veille, nous finissons par y arriver. Défi numéro deux : s'y retrouver et faire un choix parmi le petit million de vases pour ikebana du magasin sans rien connaître à l'art de l'arrangement des fleurs. On ne peut qu'espérer que celle qui s'y connaît sera satisfaite ! Une fois le défi relevé, nous pouvons aller retrouver nos amis les chats au neko-café situé quelques rues plus loin.



Les locataires de l'endroit sont comme des coqs en pâte et les humains sont tolérés à condition de dispenser les caresses comme il faut. Ici, les chats aiment qu'on leur tape les fesses avec énergie. Bon... moi je fais ça quand mon chat a fait une bêtise, mais eux ont l'air d'apprécier. Nous passons une heure (et le temps est minuté) au milieu des félins, avec des boissons qui passent au second plan. Une heure, c'est bien assez pour se détendre totalement et se mettre à bâiller comme des perdus, comme si la journée tirait à sa fin alors que l'après-midi ne fait que commencer. Une expérience vraiment agréable, il faudrait que ce genre de café ouvre à Paris !

Après cet intermède, nous prenons le chemin d'un autre monument kyotoïte immanquable : Kiyomizu-dera, célèbre pour son temple principal qui repose sur des pilotis de 20 mètres de haut. Il paraît qu'à l'époque Edo, on affirmait à ceux qui sautaient de là et survivaient que leurs vœux se réaliseraient. Ahem. On a préféré les escaliers pour découvrir la structure en bois d'en bas...




Pour Benjamin, c'est un site important car il est présent dans beaucoup de mangas, d'où un grand nombre de photos avec lui dessus. Bizarrement, c'est aussi un vrai rassemblement de kimonos. On aperçoit des hommes et des femmes, parfois même des enfants, en costume traditionnel dès qu'on tourne la tête, et on ne sait toujours pas très bien pourquoi. Mais peu importe l'explication, tous ces kimonos et ces belles parures de cheveux (réflexion de fille, ça...) donnent un côté encore plus authentique à l'endroit.



Sur le chemin du retour vers la voiture, nous nous faisons happer par la rue commerçante et craquons complètement sur les souvenirs. Au bout de deux semaines, il serait temps ! Chats porte-bonheur, cartes postales, baguettes gravées qui ne verront malheureusement passer que des sushis de chez Carrefour, tout y passe. Nous sommes bons pour vider nos trois valises et jouer à Tetris...

Pour conclure cette belle journée en beauté, puisque nous sommes dans le coin, nous nous arrêtons brièvement dans Gion, le quartier des geishas. Nous en apercevons une devant nous dans la rue (reconnaissable même de dos au maquillage blanc qui monte jusqu'au cou), mais il est encore trop tôt pour que ses collègues soient de sortie. Quelques touristes font le pied de grue devant la plus célèbre maison de geishas de Gion, mais cela ressemble trop à du harcèlement et nous préférons nous contenter de visiter le quartier. Les petites rues en bordure du canal sont suffisamment jolies et représentatives de l'endroit, pas besoin de suivre les geishas et leurs apprenties à la trace. Ce ne sont pas des bêtes de foire !



Encore une journée bien remplie malgré la grande pause de midi !

Philosophie et chats. Surtout chats, d'ailleurs. Pssst, maman, ne montre pas toutes les photos à Samaël, il va finir jaloux...

jeudi 24 avril 2014

Japon, jour 15 - Kyoto

Suite de notre découverte de Kyoto. Ce matin, nous devons nous lever et partir relativement tôt pour éviter le gros des embouteillages et être à l'heure au Palais impérial. Au Japon, on ne rigole pas avec les bâtiments impériaux : il faut réserver une visite guidée des semaines à l'avance (voire des mois dans le cas de certains sites), imprimer un permis ou le retirer à l'Agence de la maison impériale, se présenter 20 minutes à l'avance et ne surtout pas oublier son passeport. Et pendant toute la visite, en plus de la guide assermentée, nous sommes encadrés par un agent de sécurité qui s'assure que personne ne reste à la traîne et ne mette les yeux (et les pieds) là où il ne faut pas. Un peu intimidant...



Le Palais impérial de Kyoto, ce n'est pas Versailles, et la plus grande partie du site est fermée aux visiteurs. Quant à entrer dans les bâtiments, n'en parlons pas ; seuls les chefs d'état ou les têtes couronnées en visite ont droit à cet honneur (d'ailleurs, ce soir, Leurs Majestés impériales reçoivent Barack Obama. Mais on n'a pas été invités). Il faut nous contenter de l'architecture, des jardins et des quelques portes peintes que l'on peut apercevoir depuis l'extérieur, mais c'est déjà ça. Au cours de la visite d'une heure, on apprend que les bâtiments sont ouverts aux quatre vents pour avoir de la fraîcheur en été (et si vous avez froid en hiver, 12 couches de kimonos feront l'affaire), que les planchers grincent pour avertir l'empereur de votre arrivée et que l'empereur ne posait autrefois jamais le pied par terre (on le portait dès qu'il devait sortir). Quant au protocole de la cour, il était si rigide que Louis XIV en aurait été jaloux.



Après cette introduction aux mœurs impériales, nous faisons un petit tour dans les jardins est, où l'on peut observer des cerisiers à double pétale assez uniques. Il y avait les cerisiers roses et les cerisiers blancs, il y a maintenant ceux qui cumulent les deux couleurs ! Une petite fille se trempe les pieds dans le ruisseau qui court au milieu des arbres, et on aimerait bien faire pareil : midi approche et le soleil tape déjà dur. Courage, fuyons : nous nous replions vers la voiture pour rejoindre notre deuxième étape, le château Nijo-jo.

Ce château construit par Tokugawa Ieyasu, encore lui, possède une enceinte fortifiée et était autrefois surveillé par des plantons de samouraïs, mais pour un château soi-disant "fort", c'est tout de même un peu léger. Le détail rigolo, comme dans le palais impérial, c'est le plancher qui grince pour avertir de la présence de visiteurs indésirables (mais ça ne marche pas pour les ninjas qui marchent au plafond...). Nous sommes davantage impressionnés par l'élégance des portes peintes, la beauté incroyable de la grande porte et l'harmonie des jardins pas secs du tout.



Etape suivante de cette journée-marathon : Sanjusangen-do, dédié à la déesse Kannon. Ce temple pourrait ressembler à n'importe quel autre croisé au cours de notre voyage, si ce n'était sa salle principale de 120 mètres de long. Mais une salle de cette taille avec une petite statue au milieu, c'est triste. Alors pour remplir tout ça, à l'époque de la construction, on a fait réaliser 1 000 statues dorées à taille humaine de Kannon. Mille. Genre 1 avec trois zéros derrière. Leurs visages sont très similaires, mais toutes ont des vêtements différents, et toutes ont rien moins que 40 bras. Elles sont bien sagement alignées en rang d'oignons sur les 120 mètres de la salle, comme une armée étincelante et un peu inquiétante, et c'est à couper le souffle. Mais 1 000 statues ne suffisant apparemment pas, on a rajouté une Kannon de 3 mètres de haut au milieu de tout ça, ainsi que 28 divinités issues de l'hindouisme en guise de gardiennes. Le touriste qui oserait contrevenir à l'interdiction de photographier se ferait manger tout cru...




Dernier arrêt de la journée : Nanzen-ji, une ancienne villa aristocratique reconvertie en temple zen. Vous commencez à connaître, qui dit zen dit jardin de cailloux. Mais ce temple-ci a des attraits bien plus intéressants qu'un jardin sec. Il est tout d'abord construit en bordure d'un aqueduc datant de l'ère Meiji (enfin, l'aqueduc a été bâti à côté du temple, vu les dates...) qui offre des paysages assez inhabituels. Ensuite, il comporte une peinture sur porte célèbre, le "Tigre buvant de l'eau". Et pour finir, sa porte se visite ! C'est la première fois du séjour que nous avons l'occasion de visiter une porte et nous découvrons que l'intérieur est sérieusement travaillé. Comme dans la plupart des pagodes, les piliers et le plafond sont peints de couleurs vives et les statues de diverses divinités veillent au grain. Les édifices en bois basiques ne sont pas au menu, dans ce pays...



Complètement cuits par le soleil franchement estival et épuisés par une nouvelle semaine de visites non-stop, nous rentrons tôt à l'hôtel et nous faisons monter à dîner dans notre chambre. Il faut bien profiter de la partie "repos" des vacances, de temps en temps !

Une journée bien remplie !

mercredi 23 avril 2014

Japon, jour 14 - Kyoto

Comme nous avons toujours une journée d'avance sur le programme, nous voici à Kyoto 24 heures plus tôt que prévu. Etant donné que la ville abrite quelque chose comme 20 % des Trésors nationaux du Japon et une vingtaine de sites classés au Patrimoine mondial de l'humanité, on ne devrait pas s'ennuyer d'ici dimanche !

Pour nous faciliter un peu la tâche et être aussi exhaustifs que possible, nous avons regroupé les visites par quartier. Aujourd'hui, nous sommes dans le nord-ouest de la ville, qui regroupe pas mal de sites exceptionnels. Nous commençons par le temple Koryu-ji, dont le hall principal est l'un des plus vieux bâtiments de Kyoto. A 11 heures du matin, il n'y a pratiquement personne et nous pouvons profiter du lieu en toute tranquillité. L'endroit est minuscule, et en dehors d'une célèbre statue du Bouddha de la Terre pure, il n'y a pas grand-chose à voir. Nous trouvons malgré tout le moyen de nous fouler un neurone en essayant d'associer les noms japonais des divinités fournis dans notre guide aux noms sanskrits souvent utilisés dans les musées. Déjà que nous avions du mal avec les 33 incarnations de chaque divinité, alors si en plus chaque incarnation porte deux noms...




A quelques kilomètres de là se trouve l'une des cartes postales les plus célèbres de Kyoto : Kinkaku-ji, le Pavillon d'or, bâti par un ancien shogun reconverti en moine. Comme d'habitude, ce n'est plus tout à fait l'original, puisque le temple a été brûlé en 1950 par un moine pas tout seul dans sa tête (et dire qu'il avait échappé à toutes les guerres depuis le 15è siècle...). Mais cette version brille à peu près autant que la première et se reflète très joliment dans l'eau de l'étang au bord duquel il est construit. Le flot des touristes est impressionnant et il faut jouer des coudes pour prendre des photos, mais la vue vaut bien quelques efforts. Une fois le pavillon perdu de vue, on se contente de suivre un petit chemin balisé dans un charmant jardin. Un peu comme un parc d'attractions, en fait : on fait la queue longtemps et le manège est fini en quelques minutes !




Le Kinkaku-ji derrière nous, nous faisons à pied le petit kilomètre et demi qui nous sépare du complexe monastique Daitoku-in. On y entend à peu près autant de bruit que dans la nécropole de Koya-san, même si les touristes s'y font plus nombreux. Il s'agit en fait d'un ensemble de 22 temples, dont seulement quatre sont ouverts au public en temps normal. Mais nous avons un peu de chance : en ce moment et pour une durée très limitée, deux de plus sont accessibles. Nous avons donc 6 temples à découvrir - en d'autres termes, nous avons 6 séances de retirage/remettage de chaussures devant nous. Au bout d'un moment, on ne se donne même plus la peine de refaire nos lacets...




Évoquer chaque temple individuellement reviendrait à faire du copier-coller. Place au résumé, donc. Les six temples de Daitoku-in sont des temples zen, ce qui se caractérise surtout par les fameux jardins secs à base de petits cailloux et de traces de râteau (comment font les jardiniers pour ne pas laisser de traces de pas au milieu du gravier, d'ailleurs ?!). Dans l'un des temples, nous découvrons d'ailleurs le plus petit jardin sec du Japon, qui ne peut contenir que deux rochers. Encore une  fois, chacun de ces jardins est une métaphore philosophique profonde sur le sens de la vie, le temps qui passe et la recherche du bonheur. Heureusement qu'il y a des brochures pour nous expliquer, parce qu'on serait bien en peine d'analyser ça tout seuls ! Malheureusement, notre combo temple/jardin préféré n'autorisait pas les photos pour cause de revente sur Internet par des touristes indélicats. Dommage...




Pour poursuivre la thématique jardins/cailloux philosophiques, nous nous rendons ensuite à Ryoan-ji, un parc qui éclipse un peu le temple autour duquel il est construit et le jardin zen de celui-ci. Et hop, septième déchaussage de la journée ! Un record ! Nous ne nous attardons pas vraiment dans le temple lui-même (au bout de 7, les jardins zen commencent un peu à se ressembler) et préférons profiter du reste du parc, avec ses petits ponts de pierre, ses arbres en plumeau, ses îlots et ses tortues. Benjamin regrette un peu que le chemin soit tracé et qu'on ne puisse pas explorer les chemins de traverse (le réflexe du gamer qui part toujours du côté opposé à la flèche), mais l'ensemble reste vraiment mignon et permet de se détendre après une journée bien remplie sous le soleil.




La météo annonce un temps radieux à Kyoto jusqu'à la fin de la semaine. Espérons que nous puissions visiter toute la ville sous le même ciel qu'aujourd'hui !

On laisse Benjamin aux photos une journée et voilà le résultat !

mardi 22 avril 2014

Japon, jour 13 - Nara

Nous l'avons fait ! Tirés du lit à 6h30 par un message dans les hauts-parleurs de l'auberge, nous assistons avec les pèlerins et les visiteurs étrangers à la cérémonie matinale, à genoux sur des tatamis dans une salle qui sent l'encens d'un coin à l'autre. Les moines récitent des mantras de cette voix monocorde un peu inquiétante pendant qu'un de leurs collègues fait venir les pèlerins japonais un à un devant l'autel pour leur demander de prier. Même à moitié endormis, c'est une sacrée expérience. A la fin de la cérémonie, nous faisons un petit tour de la salle pour admirer les objets religieux, puis nous allons prendre le petit-déjeuner. Hasard ou pas, tous les Occidentaux se retrouvent dans la même salle, face à un repas composé encore une fois de riz, de thé et de bidules difficilement identifiables. Ça manque cruellement de sucre, et heureusement que le riz est à volonté, sinon il y aurait de quoi mourir d'inanition. Mais il fallait tenter l'expérience et nous en sommes ravis !

Après un arrêt-éclair à la porte de Koya-san, que nous avions manquée hier, nous voici partis pour Nara (les dieux doivent encore être furax, parce que nous sommes coincés derrière des camions rapides comme des escargots chevauchant des tortues pendant tout le trajet), où nous arrivons sur le coup de 11 heures. Le gros des visites du jour se situe dans le parc de Nara, célèbre pour ses daims dits "gloutons". Avec le temps, les bestioles ont un peu oublié qu'elles étaient herbivores et se font aujourd'hui nourrir à coups de gâteaux spéciaux par des touristes qui en redemandent. A peine arrivés, nous cédons à l'attrape-touristes et constatons que les daims deviennent vraiment fous furieux en présence de nourriture !




Mais il faut savoir redevenir adultes, et le temple Kofuki-ji est là pour nous y aider. Vous commencez à connaître la chanson : le temple d'origine a été construit au 7è siècle de notre ère, mais les différents bâtiments ont brûlé entre 5 et 7 fois et la dernière reconstruction remonte au milieu du 15è siècle. Autant dire que Kofuki-ji s'en tire plutôt bien, comparé à certains de ses petits copains ! Il y a là une belle pagode et surtout un grand hall où est exposé une belle et grande statue en bronze du Bouddha médecin. Cela dit, les termes "belle" et "grande" sont à relativiser par rapport à l'autre Bouddha que nous verrons un peu plus tard...




Un peu plus loin, après un déjeuner avalé en vitesse (qu'est-ce qu'il fait faim quand on a petit-déjeuné dans un temple à 7h !), nous attaquons le morceau de bravoure de Nara, le temple Todai-ji. La porte est superbe. Ses gardiens sont très beaux. Les petits temples renfermant des statues en laque séchée et des armées de gardiens célestes sont très intéressants. Mais ce n'est rien, absolument RIEN comparé au Daibutsu-den, le pavillon central qui héberge le Grand Bouddha (majuscules obligatoires).




Non content d'être le plus grand bâtiment en bois du monde (et encore, sa taille a été réduite d'un tiers après le dernier incendie), le Daibutsu-den abrite le plus colossal Bouddha en bronze de la planète. 15 mètres de haut, quand même. A l'entrée, on est littéralement écrasé par les dimensions de ce monstre, qui ne tient sur les photos qu'avec un recul absurde. Et quand on se dit que la chose date du 8è siècle (ou presque, elle a été largement rénovée depuis), on se sent encore plus petit. C'est beau, c'est fascinant, c'est sidérant de grandeur.




Pour nous remettre de toutes ces émotions, rien de tel qu'une nouvelle séance de nourrissage des daims et un sanctuaire perdu au milieu des arbres, le Kasuga-taisha. L'endroit est surtout réputé pour ses lanternes en pierre et en bronze, qu'on allume deux fois par an à l'occasion d'un festival. Sachant qu'il y en a 3 000, il doit falloir commencer la veille pour que tout soit prêt le jour J... De notre côté, nous sommes plus impressionnés par la glycine que l'on retrouve aussi bien dans le paysage qu'au front des servantes du culte. Joli mais pas facile à porter !




Sur cette note colorée, nous quittons le parc de Nara pour un site situé à mi-chemin de notre hôtel : le temple Horyu-ji, qui regroupe les plus anciens bâtiments en bois du monde (décidément, c'est la journée des superlatifs...). Dans ce qui est sans doute un record inégalé au Japon, le site n'aurait brûlé qu'une fois et aurait été reconstruit au 8è siècle. Du coup, on se sent à peu près aussi insignifiant que face au Grand Bouddha, mais pas pour les mêmes raisons... Et pour poursuivre dans la série "le machin le plus [insérer adjectif de votre choix ici] du [monde/pays]", la pagode est la plus ancienne du Japon. Rien que ça.




L'heure étant bien avancée, nous sommes obligés de faire la visite assez rapidement, mais cela ne nous empêche pas de passer un peu de temps dans la salle du Trésor, qui regroupe des dizaines de statues d'âge aussi vénérable que les bâtiments. Devant de telles merveilles, on ne peut pas s'empêcher de philosopher sur le fait que, à l'époque où le Japon était un modèle de raffinement et de culture, l'Europe se roulait dans la boue et les rois de ce qui n'était pas encore la France portaient des noms affreux du style Dagobert ou Childéric. Pas glorieux.

A partir de demain, nous attaquons le plus gros morceau du séjour : l'ancienne capitale, Kyoto.
Par ici les photos ! Et pour ceux qui veulent se moquer, on a même une petite vidéo en prime... ;)

lundi 21 avril 2014

Japon, jour 12 - Koya-san

La punition divine continue ce matin... Heureusement que nous avons un peu de route pour mettre de la distance entre nous et tous ces nuages ! L'inconvénient d'avoir bouclé en une journée le programme de deux, c'est que nous devons refaire en sens inverse une partie du trajet déjà faite hier. Le trajet de Kumano jusqu'à Koya-san nous prend donc 4 bonnes heures au lieu des 2h30 initialement prévues, mais il faut bien avancer !

Nous arrivons à Koya-san sur le coup de 14 heures, et malgré cela, la journée réussira à être particulièrement remplie. Koya-san, c'est la plus grande cité monastique du Japon, le repaire d'un millier de moines disséminés dans une centaine de monastères. Si on devait se risquer à des comparaisons hasardeuses, on pourrait qualifier le lieu de Saint-Jacques-de-Compostelle du Japon. On commence très fort avec le complexe sacré Danjo Garan, un site auquel le guide Michelin attribue de façon incompréhensible une seule étoile (contre trois pour les temples Ikea d'Ise-shima). Nous, on lui en donnerait bien cinq.



Les bâtiments Danjo Garan font partie de ces innombrables édifices japonais en bois détruits par le feu entre 5 et 7 fois depuis leur apparition. Ils ont été reconstruits à chaque fois, pratiquement à l'identique. Au 19è siècle, certaines personnes avec deux sous de jugeote on finit par se dire que le bois, c'était bien gentil, mais que le béton armé plaqué bois avait beaucoup moins de chances de finir en cendres. Ajoutez une couche de peinture vermillon par-dessus, et on n'y voit que du feu. La grande "stupa" (la pagode) est de toute beauté et tranche sérieusement au milieu des autres bâtiments plus sobres.



Ladite pagode renferme une grande statue dorée du Bouddha cosmique, entourée de quatre statues un chouia plus petites mais tout aussi dorées, qui font se décrocher la mâchoire du pauvre visiteur que personne n'a prévenu. Quand on prend le temps de s'asseoir devant une statue pour la contempler, c'est que ça en vaut vraiment la peine. Mais il faudra que vous nous croyiez sur parole, parce que les photos sont interdites et que nous sommes trop bien élevés pour passer outre...

Après Danjo Garan, place à Kongobu-ji, le quartier général de la secte bouddhique Shingon. Moins grandiose que le précédent (tout le monde ne peut pas avoir 5 Bouddhas dorés chez soi), l'ensemble a le mérite d'être visitable et intéressant. Et je ne dis pas ça parce qu'on nous offre du thé et des gâteaux en plein milieu du temple... La visite explique comment le très saint Kobo Daishi a ramené le bouddhisme Shingo de Chine en l'an 815 et décidé de fonder un monastère à Koya-san. On découvre également un très beau jardin de cailloux, le plus grand du Japon, censé représenter deux dragons dans une mer de nuages (vu du ciel, sans doute ; nous, pauvres mortels, on n'y voit qu'une jolie disposition de rochers), ainsi que des portes coulissantes toutes peintes par des maîtres (là encore, photos interdites). C'est absolument ravissant et on a envie de jeter le Michelin au feu pour n'avoir donné à l'ensemble qu'une seule étoile.



Après une tentative ratée de visite du mausolée Tokugawa, fermé 10 minutes avant l'heure (si même les Japonais se mettent aux horaires de la Poste, maintenant...), nous prenons la direction de la nécropole de Koya-san, Okuno-in. Ce cimetière géant abritant 200 000 tombes, nous n'aurons évidemment pas le temps de tout voir, mais le petit échantillon que nous découvrons est suffisamment sidérant. Le très, très ancien côtoie l'ultra-moderne sous les frondaisons des cyprès, et la brume s'invite au bon moment pour donner à l'ensemble un aspect fantomatique. Nous sommes à peu près aussi touchés et impressionnés que dans le carré juif du cimetière de Vienne, qui était resté une référence pour nous en matière d'émotion et de tranquillité.



On y croise un nombre impressionnant de statues, certaines en parfait état, d'autres tombées, ou couvertes de mousse, ou décapitées, ou tout simplement farfelues (que fiche ce poisson ici ?!). Il y a des tombes modestes et émouvantes, il y a des grands de ce monde enterrés dans de véritables mausolées, et il y a des horreurs qui n'auraient pas dû être autorisées, telle cette fusée, érigée par une entreprise aéronautique. Et encore, nous n'avons pas trouvé la tasse qui symbolise une compagnie de café, ou le monument construit par un fabricant d'insecticides pour demander pardon aux fourmis (véridique. Vous avez le droit de rire). Mais le bâtiment le plus imposant de la nécropole est Toro-do, le hall aux mille lanternes, où brillent en continu des milliers de lanternes offertes par les fidèles, pour certaines depuis plusieurs siècles. Dans la lumière déclinante, c'est un véritable enchantement (pas de photos, blah blah, vous commencez à connaître).



Juste derrière, on trouve la crypte qui abrite Kobo Daisha, entré en méditation éternelle il y a 1 200 ans. Les croyants sont absolument convaincus que le saint est toujours vivant et qu'il médite pour toute l'éternité. Et pour lui demander d'intercéder en faveur des mortels, on offre au bonhomme deux repas par jour, des vêtements et un éventail en été. Apparemment, la méditation n'empêche pas d'avoir des besoins très basiques...

Ce soir, pour coller au plus près à l'ambiance locale, nous logeons dans un temple-auberge, tenu par des moines, donc. Nous nous attendions à quelque chose d'intimiste et sommes surpris de découvrir un très grand établissement qui tient beaucoup plus de l'hôtel que de l'auberge. En revanche, le côté "temple" est bien là : les tenanciers sont des bonzes, les bains sont partagés (on y prend goût, en fait !) et le dîner végétarien se compose de... trucs. En dehors du riz, de l'orange et des tempuras, nous n'avons pas la moindre idée de ce que nous avons mangé, mais nous l'avons mangé ! Et demain, cérémonie religieuse et petit-déjeuner toujours végétarien à 6h30. Eeeeuh... d'accord. Comme on dit, à Rome, il faut faire comme les Romains !

Possible overdose de statues !