Sur
place, le brouillard est aussi dense qu'hier, et nous craignons un
moment que la mauvaise visibilité n'empêches le zodiac de sortir
sur le lac. Du tout, nous rassure la vendeuse de billets : les
bateaux sont équipés de GPS, et même si les icebergs ne sont pas
répertoriés dessus, c'est bien suffisant pour retrouver son
chemin ! Nous nous équipons donc de combinaisons dignes d'une
expédition en Antarctique et embarquons sur un zodiac pour nous tout
seuls. Il faut croire que nous étions les seuls à être
suffisamment courageux pour affronter la glace et le brouillard au
saut du lit !
Notre
guide, Karl, met les gaz, et nous sommes partis pour une heure
d'expédition sur le lac glaciaire. Le zodiac zigzague entre les
petits glaçons, les gros icebergs et les morceaux de glace de toutes
les tailles intermédiaires, et dès les premières minutes, nous
sommes transportés dans un autre monde. Comme il s'agit de la
première sortie de la journée, il faut parfois déblayer le terrain
et identifier les voies navigables, mais Karl réussit malgré tout à
nous conduire rapidement à la pointe du glacier. Le monde du silence
version glace : on a l'impression d'avoir pénétré dans un
univers parallèle, où le seul bruit est celui des icebergs qui se
brisent.
Karl
nous raconte l'histoire du glacier et nous explique pourquoi les
icebergs ont des couleurs différentes : bleu pour ceux qui
viennent de se détacher du glacier, blanc pour ceux qui ont déjà
commencé à fondre et noir pour les couches de cendres volcaniques
intégrées à la glace. Il nous permet même de toucher un bloc de
glace vieux d'une centaine d'années et de nous lever dans le zodiac
pour apprécier pleinement le paysage autour de nous. Il fait un
froid mordant sur cette étendue d'eau qui semble ne jamais finir, et
la pluie vient se mêler de la partie, mais le spectacle est à
couper le souffle. L'expérience vaut bien d'avoir écourté la nuit
et rallongé notre parcours de la journée de plus de 150 km. Nous
repartons totalement transis mais ravis !
La
suite du programme semble un peu compromise en raison du brouillard.
Nous devons en effet découvrir les fjords de l'est, mais la
visibilité est extrêmement mauvaise : à certains endroits, on
ne distingue même plus la route à dix mètres, alors la mer, il ne
faut pas y compter ! Après le déjeuner, nous décidons malgré
tout, sans trop y croire, de tenter notre chance avec le premier
fjord. Nous poussons donc jusqu'à Stöðvarfjörður (non, oubliez
l'idée de le prononcer) – et nous faisons bien, car le ciel semble
décidé à s'éclaircir.
Nous
observons de loin le jardin de Madame Petra, une vieille dame qui
collectionne les cailloux et a fait de sa demeure le premier musée
minéralogique privé du monde. Quand on voit l'extérieur, on n'ose
imaginer à quoi doit ressembler le reste de la maison...
Encouragés
par le temps, nous poursuivons notre route jusqu'à Faskruðsfjörður
(…), le « camp de base » des pêcheurs de morue
français jusqu'au début du 20è siècle. Ceux-ci ont à l'époque
fait construire un hôpital et une chapelle, et 49 d'entre eux sont
enterrés dans un tout petit cimetière au bord de la mer. Nous nous
arrêtons dans le café du village, qui fait également office de
musée, pour boire un thé, servi par un étudiant islandais dont le
français force l'admiration. Dernière étape du parcours,
Reyðarfjörður (jamais deux sans trois !), le plus escarpé
des fjords, se dévoile le long d'une route d'une beauté à couper
le souffle, mais qui a une fâcheuse tendance à se transformer en
piste gravillonnée sur plusieurs kilomètres. Nous nous arrêtons à
plusieurs reprises pour prendre des photos, d'autant que le soleil
nous fait la grâce de montrer le bout de son nez.
Sur
le chemin de l'hôtel, le soleil et le ciel bleu se font plus francs,
ce qui laisse présager de bonnes choses pour demain. Ce soir, nous
logeons dans un village-hôtel perdu au cœur de la plus grande
(d'aucuns diraient la seule) forêt islandaise. Surexploitée pour la
construction de maisons et de drakkars, la forêt a en effet
pratiquement disparu dans le pays, et le reboisement n'a commencé
qu'au début du 20è siècle. Hallormsstaður a pour ainsi dire
poussé entre les arbres, et le cadre de l'hôtel est tout bonnement
enchanteur : cascade à gauche, lac et montagnes en face,
élevage de chevaux et bungalows à gauche. Le bâtiment lui-même
est très vieillot et la déco surprend autant que les environs.
A
peine nos valises posées, nous partons en expédition du côté de
la cascade. La balade se transforme très vite en trek au sommet de
la chute, ce qui nous permet d'en découvrir une deuxième, plus
petite, cachée derrière ! Après l'effort, le réconfort :
l'hôtel dispose d'un « hot tub », ou piscine chaude,
dans laquelle nous allons nous relaxer une petite heure avant le
dîner. Après la randonnée d'hier, l'eau chaude est la bienvenue
pour les muscles ! Et que dire de ce buffet islandais qui
propose trois sortes de saumon ? Une bien belle étape !
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