lundi 13 mai 2024

Italie du Nord, jours 9 à 11 - Le lac d'Iseo et ses environs

C'est presque un théorème mathématique : dès qu'il y a moins d'eau et moins de photos instagrammables à faire, la densité de touristes chute drastiquement... Cela ne veut pas dire qu'il n'y a personne dans la vieille ville de Bergame ce matin, mais au moins, nous trouvons facilement à "poser notre serviette", comme dirait Benjamin.

La voiture était un must pour nous rendre dans la ville haute, car après plus d'une semaine de voyage et un certain nombre de kilomètres dans les pattes, nous ne sommes plus vraiment en mesure d'avaler 100 mètres de dénivelé positif de bon matin. Mais qui dit altitude dit forcément jolies vues, et les panoramas sur les Alpes et la plaine du Pô sont absolument magnifiques. Histoire d'en profiter au maximum, nous grimpons au sommet du campanile qui trône au milieu de la superbe Piazza Vecchia   et avec notre timing habituel, nous nous trouvons pile sous les cloches au moment où celles-ci sonnent la demi-heure. Une expérience rigolote... tant qu'on garde les doigts fermement enfoncés dans les oreilles.

La Piazza Vecchia compte également son lot d'édifices religieux assez remarquables, à commencer par la chapelle Colleoni, sa façade qui se la pète et sa statue intégralement en or de Bartolomeo Colleoni, chef des armées vénitiennes pendant une partie des quatre siècles où Bergame fut gouvernée par la Sérénissime. Juste à côté, la basilique Santa Maria Maggiore paraît carrément sobre de l'extérieur, mais à l'intérieur, c'est une autre histoire. Entre les marqueteries à tomber par terre de la clôture du chœur, la débauche de stucs et de fresques, les tapisseries florentines, le confessionnal finement sculpté et le tombeau de Donizetti, on ne sait plus vraiment où donner de la tête et de l'objectif. Pour une "petite église", la quantité de merveilles au centimètre carré est assez sidérante. Le duomo adjacent est également une excellente surprise : les blancs et les ors sont très élégants, les peintures en trompe-l'œil du plafond impressionnantes, et le grande croix en argent du chœur vaut son pesant de cacahuètes. Nous sommes rarement en désaccord avec le Guide du Routard, mais pour une fois, nous estimons que cette cathédrale vaut bien plus que l'unique étoile qui lui a été attribuée !!

Toujours dans le thème "le dénivelé, non merci", nous empruntons le funiculaire pour nous rendre au castello San Vigilio, perché à 100 mètres au-dessus de la vieille ville. Il ne reste plus grand-chose de ce château médiéval qui surveillait les environs avant que les Vénitiens, les Français et les Autrichiens ne s'en emparent successivement, mais la vue, elle, est toujours aussi spectaculaire. On aperçoit même les gratte-ciel de Milan qui se découpent au loin, dans leur petit nuage de pollution... La descente étant tout de même plus simple que la montée, nous faisons l'effort de redescendre à pied à la vieille ville, histoire de profiter un peu plus longtemps des paysages.

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Autre ville de la région valant son pesant de cacahuètes : Brescia, deuxième dame de Lombardie après Milan, berceau de plus de 100 000 entreprises et usines. Forcément, la vue depuis les hauteurs est moins sympa, mais la vieille ville renferme quand même des trésors de taille, à commencer par le castello, l'une des plus grandes forteresses du nord de l'Italie. Malgré les pentes plus que costaudes qui y mènent, le parc du château est envahi de cyclistes et de joggeurs qui profitent de la météo quasi estivale. De notre côté, nous trouvons qu'il fait déjà trop chaud et préférons de loin découvrir le Musée des Armes et ses collections de hallebardes rigolotes (les gens qui les ont prises dans les tripes ont dû les trouver beaucoup moins drôle).

La piazza Papa Paolo VI a ceci d'exceptionnel qu'on y trouve non pas un, mais deux duomi : l'ancien, qui date du 11e siècle et renferme des fragments de mosaïques romaines ainsi que de jolies fresques, et le nouveau, beaucoup plus baroque et doté d'une coupole de 80 m de haut (la troisième plus haute d'Italie). C'est d'ailleurs là que ledit pape Paul VI, prédécesseur de Jean-Paul II (non, le pontificat de 33 jours de Jean-Paul Ier ne compte pas) fut ordonné prêtre, ce qui explique le nom de la place.

Mais le vrai joyau de Brescia, c'est le complexe muséal de Santa Giulia, qui permet de découvrir l'histoire de la ville de la préhistoire aux Carolingiens, avec un gros accent mis sur l'époque romaine. L'orientation entre les différentes salles, ailes et chapelles est franchement compliquée, même pour un Benjamin dont le sens de l'orientation légendaire nous a sauvé la vie plusieurs fois, mais vu la quantité de merveilles dont regorge le musée, la lutte avec le plan vaut largement le coup. Honnêtement, nous ne savons pas trop ce qui nous a le plus impressionnés. Peut-être le chœur des nonnes ou l'oratoire de Santa Maria in Solario couverts de fresques aux couleurs aussi vives que si elles avaient été peintes hier. Ou les bornes romaines aux inscriptions toujours impeccables. Ou les mosaïques parfaitement préservées des deux domus romaines dont on distingue toujours nettement le plan des pièces (à défaut de pouvoir déplacer les villas dans un musée, on a construit le musée dessus). Le niveau de conservation de la plupart des pièces présentées est tout bonnement sidérant. On s'attendrait presque à voir les anciens propriétaires débarquer pour récupérer leurs bibelots et leurs maisons et reprendre leur vie comme si de rien n'était.

Mais le plus époustouflant (du moins pour nous) est à chercher du côté du parc archéologique de Brixia, le nom romain de Brescia. Complètement abandonné autour de l'an 800, le temple dédié à Jupiter, Junon et Minerve est resté enseveli sous des tonnes de terre pendant un bon millénaire et n'a été redécouvert et excavé au 19e siècle. La terre en question a fait des miracles pour préserver fresques et statues pendant tout ce temps, et le niveau de précautions pris pour accueillir les visiteurs est digne de Fort Knox : on entre à heure fixe et par petits groupes pour éviter d'ouvrir les portes trop souvent et ainsi conserver une température et une humidité à peu près fixes. Résultat, les couleurs sont aussi éclatantes qu'au premier jour, et la Victoire ailée datant du 1er siècle de notre ère ne fait vraiment pas son âge. C'est bien simple, nous sommes tombés fous amoureux de cette merveille.

Un musée pas facile à suivre, mais sans doute l'une des plus belles collections que nous ayons eu la chance de voir au cours de nos voyages !

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Maintenant que nous avons bien exploré la partie "environs" du titre de cet article, il est temps de passer à la partie "lac d'Iseo", en commençant par le petit village de basse montagne de Clusone. Si le village lui-même ne paie pas de mine, il abrite pourtant une basilique à l'intérieur un peu tagapeur (dans le bon sens du terme), et surtout une Danse macabre exceptionnelle de 1485. La Faucheuse couronnée y est accompagnée de deux serviteurs qui dégomment du vivant à l'arc et au tromblon, tandis que les puissants de ce monde font tout ce qu'ils peuvent (en vain, bien sûr) pour la tenir à distance. Dans la chapelle attenante, on découvre une véritable "bande dessinée" consacrée à la vie de Jésus dans le même état de conservation spectaculaire. L'ensemble est délirant, et forcément, on adore.

Après le gros échec de Côme, nous avons fini par redouter de nous approcher des lacs, mais le petit Iseo n'a pas le même attrait que ses grands voisins pour les touristes – tant pis pour eux, parce que c'est joli comme tout, et tant mieux pour nous, parce que nous avons un peu la paix, pour une fois ! La promenade sur le lungolago dans le village qui a donné son nom au lac est très reposante (les rares touristes à avoir fait le déplacement sont tous au restaurant), même si nous manquons y laisser nos chaussures lorsque les vagues créées par le passage d'un bateau inondent la chaussée. La rue au ras de l'eau, c'est joli sur les photos, mais c'est un danger public !!

Parce que tout ça manquait apparemment d'un peu d'eau, nous finissons la journée dans le hameau de Gaina, pour une petite randonnée de 5 km le long du Sentier des Cascades. La version "facile" de la balade étant plutôt ardue (nos mains nous ont servi presque autant que nos pieds), nous nous demandons à quoi doit ressembler la version "experts". Cordes et mousquetons sont apparemment requis, d'après les panneaux au début du sentier. Et on nous dit que nos vacances ne sont pas reposantes !

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