Pour vous dire à quel point notre hôtel est idéal pour rayonner dans la région, ce matin, nous reprenons littéralement la route que nous avons faite hier soir pour aller dîner... mais cette fois, nous nous arrêtons au château de Chaumont-sur-Loire plutôt qu'au restaurant. Le temps a viré au gris et il tombe des gouttes éparses, mais ce n'est finalement pas plus mal : Chaumont est presque plus connu pour son Festival International des Jardins que pour ses intérieurs, et la visite aurait été difficilement supportable avec la canicule des derniers jours. La température est à peu près correcte et il ne pleut pas encore à seaux, c'est le créneau idéal pour faire le tour des installations paysagères de cette année.
Thème de 2017 : le pouvoir des fleurs. Les jardiniers/paysagistes/artistes internationaux invités proposent 24 tableaux différents au sein même du parc du château, avec un sous-thème par tableau. Des fois, on valide la petite explication fournie dans le guide, et d'autres fois, on se dit que les jardiniers doivent fumer leurs propres créations, parce qu'on ne voit pas bien où ils veulent en venir. Ou alors, nous sommes des béotiens - ce qui est tout à fait possible aussi. Dans une autre partie du parc, les petits jardins plus pérennes d'inspiration asiatique sont moins envahis par les touristes, mais ils ont aussi l'inconvénient d'être entourés d’œuvres contemporaines auxquelles nous n'adhérons pas du tout. La directrice actuelle du château est semble-t-il une grande amatrice d'art contemporain, et dans un château et un parc Renaissance, ça tranche un peu...
Faire le tour des jardins à la fraîche était une excellente idée, car la visite nous prend près d'une heure et demie, ce qui aurait été un supplice en début de semaine. Après le dehors, passons au dedans et à la partie historique. Le château de Chaumont appartenait à Diane de Poitiers, favorite d'Henri II, avant que la régulière d'Henri, Catherine de Médicis, ne force la favorite à le lui restituer en échange de Chenonceau. Le deal n'était pas trop vilain, ni l'une ni l'autre n'y a vraiment perdu au change : Chenonceau et son miroir d'eau sont certes très beaux, mais Chaumont a un petit côté "château Disney parfait" avec ses grosses tours rondes. La plupart des pièces ouvertes à la visite sont restées dans leur jus Renaissance, et pour une fois, on a même droit aux tapisseries qui vont avec. Malheureusement, on a aussi droit à d'autres œuvres contemporaines, qui nous amusent beaucoup moins que les Legos d'hier. A part la chapelle envahie de branches et d'oiseaux, ça détonne beaucoup trop pour nous.
Après un rapide passage par les écuries, considérées au 19è siècle (alors que Chaumont appartenait au prince et à la princesse de Broglie) comme les plus modernes et les plus luxueuses d'Europe, nous reprenons la route, cette fois pour la Touraine. Direction Amboise, la ville la mieux lotie du coin en matière de châteaux remarquables, puisqu'il y en a pas moins de trois. LE château d'Amboise, ce sera pour demain. Aujourd'hui, nous nous contenterons des deux plus petits - par la taille, mais certainement pas par la réputation.
On commence donc par le Clos Lucé, un peu pris d'assaut en ce premier dimanche des vacances d'été. C'est là que François Ier passa ses jeunes années, mais si le château est connu, c'est surtout pour avoir hébergé un certain peintre/ingénieur/inventeur/trifouilleur de génie pendant les trois dernières années de sa vie. Léonard de Vinci est venu s'y installer avec armes et bagages, plus une Joconde, un Saint Jean-Baptiste et une Vierge à l'Enfant avec Sainte Anne (autant dire pas ses œuvres les plus moches), y est mort en 1519, et ce séjour éclipse absolument tous les autres personnages historiques qui sont un jour passés dans les murs.
La reconstitution des pièces de vie et du studiolo du maestro sont très jolies, mais ce qui attire surtout l'attention, ce sont les maquettes réalisées d'après les plans d'origine de Léonard. On a beau savoir que le bonhomme était en avance sur son temps, on ne réalise vraiment à quel point qu'une fois confronté à des salles entières remplies de ses idées. Vélo, mitrailleuse rotative, hygromètre, compteur kilométrique, char d'assaut, bouée de sauvetage, automobile, parachute, pont pivotant... C'est simple, quand il n'en a pas eu l'idée lui-même avec 400 ans d'avance, il a perfectionné le design existant. Devant toutes ces inventions ultra-modernes, on finit par se dire que Léonard disposait d'une machine à voyager dans le temps ou avait un don de voyance. Ne pas pouvoir toucher aux maquettes exposées dans le château est assez frustrant, mais les concepteurs du musée ont pensé à tout : dans le parc, des versions grandeur nature ne demandent qu'à être manipulées. La roue à aubes, le marteau-pilon, le tank ou la vis d'Archimède sont intégrés comme des éléments de décor, entre les arbres et les cours d'eau. L'ensemble est très naturel, très bien fait, et réussit à intéresser l'ingénieur comme la tout-sauf-scientifique.
Nous nous accordons une petite glace au milieu du parc pour nous reposer un peu, puis nous partons à la découverte du château Gaillard. A l'origine, ce château-là n'était prévu au programme que demain, mais vu qu'il se situe à 500 mètres du Clos Lucé, il aurait été idiot de passer à côté.
De façon générale, si vous êtes de passage à Amboise, il serait idiot de passer à côté tout court, car comme dirait Benjamin, cette visite est épique. Certains guides touristiques ne font même pas encore mention de son existence et son histoire est rocambolesque : jusqu'à son rachat en 2011, Château Gaillard avait tout bonnement disparu des cartes, des mémoires et même des archives des Monuments historiques et du Ministère de la Culture. Pendant environ 80 ans, ce domaine de 15 hectares en plein Amboise, à deux pas d'un des sites les plus touristiques de la ville, a été tout bonnement invisible (un prince changé en bête aurait pu vivre là avec ses domestiques transformés en meubles, personne ne l'aurait remarqué). Les nouveaux propriétaires ont investi des sommes folles de leur poche pour remettre en état le château et transformer la forêt vierge qui l'entourait en jardin Renaissance, les travaux ont duré 5 ans, les touristes sont à nouveau les bienvenus, et la visite vaut vraiment la peine.
Le plus fou, dans cette histoire, c'est que le Château Gaillard n'appartenait pas exactement à n'importe qui : le château Renaissance a été construit sur ordre de Charles VIII, qui avait fait raser la forteresse médiévale existante après en avoir exproprié le fondateur (expropriation qui a probablement eu lieu depuis la plus haute fenêtre du donjon, d'ailleurs). Château Gaillard, c'est rien moins que le premier château avec jardins à l'italienne de France. C'est aussi là qu'un jardinier italien passé à la postérité, Dom Pacello, a réussi à acclimater les premiers orangers venus de Naples et créé la reine-claude. Et pour bien continuer la semaine des collections bizarres, les propriétaires ont rassemblé dans l'orangerie 60 des 62 espèces d'agrumes répertoriées dans le monde.
La visite guidée est passionnante et drôle, très riche en anecdotes historiques et sur les travaux pharaoniques qu'a nécessité le site. Le temps de la visite, on oublie totalement qu'on se trouve en ville, ce qui doit faire particulièrement plaisir à Dom Pacello, qui voulait faire de Château Gaillard un nouveau Jardin d'Eden. On joue à l'arbre généalogique des rois de France dans la salle des portraits, on essaie d'identifier les différents agrumes dans la grotte olfactive (zéro pointé pour nous ; mais depuis quand il y en a 62, aussi ?!) et on découvre des communs troglodytiques uniques en leur genre. Épique, donc. Vivement que tous les guides mentionnent le domaine, car tout ce travail mérite d'être récompensé et soutenu.
L'orage qui couve depuis ce matin éclate précisément alors que nous rejoignons la voiture. Timing parfait ! Après une journée aussi dense, il est plus que temps d'aller nous poser à l'hôtel. Nous attaquerons le crapahutage un peu plus tard demain matin, histoire de se rappeler que c'est quand même les vacances !
Après un rapide passage par les écuries, considérées au 19è siècle (alors que Chaumont appartenait au prince et à la princesse de Broglie) comme les plus modernes et les plus luxueuses d'Europe, nous reprenons la route, cette fois pour la Touraine. Direction Amboise, la ville la mieux lotie du coin en matière de châteaux remarquables, puisqu'il y en a pas moins de trois. LE château d'Amboise, ce sera pour demain. Aujourd'hui, nous nous contenterons des deux plus petits - par la taille, mais certainement pas par la réputation.
On commence donc par le Clos Lucé, un peu pris d'assaut en ce premier dimanche des vacances d'été. C'est là que François Ier passa ses jeunes années, mais si le château est connu, c'est surtout pour avoir hébergé un certain peintre/ingénieur/inventeur/trifouilleur de génie pendant les trois dernières années de sa vie. Léonard de Vinci est venu s'y installer avec armes et bagages, plus une Joconde, un Saint Jean-Baptiste et une Vierge à l'Enfant avec Sainte Anne (autant dire pas ses œuvres les plus moches), y est mort en 1519, et ce séjour éclipse absolument tous les autres personnages historiques qui sont un jour passés dans les murs.
La reconstitution des pièces de vie et du studiolo du maestro sont très jolies, mais ce qui attire surtout l'attention, ce sont les maquettes réalisées d'après les plans d'origine de Léonard. On a beau savoir que le bonhomme était en avance sur son temps, on ne réalise vraiment à quel point qu'une fois confronté à des salles entières remplies de ses idées. Vélo, mitrailleuse rotative, hygromètre, compteur kilométrique, char d'assaut, bouée de sauvetage, automobile, parachute, pont pivotant... C'est simple, quand il n'en a pas eu l'idée lui-même avec 400 ans d'avance, il a perfectionné le design existant. Devant toutes ces inventions ultra-modernes, on finit par se dire que Léonard disposait d'une machine à voyager dans le temps ou avait un don de voyance. Ne pas pouvoir toucher aux maquettes exposées dans le château est assez frustrant, mais les concepteurs du musée ont pensé à tout : dans le parc, des versions grandeur nature ne demandent qu'à être manipulées. La roue à aubes, le marteau-pilon, le tank ou la vis d'Archimède sont intégrés comme des éléments de décor, entre les arbres et les cours d'eau. L'ensemble est très naturel, très bien fait, et réussit à intéresser l'ingénieur comme la tout-sauf-scientifique.
Nous nous accordons une petite glace au milieu du parc pour nous reposer un peu, puis nous partons à la découverte du château Gaillard. A l'origine, ce château-là n'était prévu au programme que demain, mais vu qu'il se situe à 500 mètres du Clos Lucé, il aurait été idiot de passer à côté.
De façon générale, si vous êtes de passage à Amboise, il serait idiot de passer à côté tout court, car comme dirait Benjamin, cette visite est épique. Certains guides touristiques ne font même pas encore mention de son existence et son histoire est rocambolesque : jusqu'à son rachat en 2011, Château Gaillard avait tout bonnement disparu des cartes, des mémoires et même des archives des Monuments historiques et du Ministère de la Culture. Pendant environ 80 ans, ce domaine de 15 hectares en plein Amboise, à deux pas d'un des sites les plus touristiques de la ville, a été tout bonnement invisible (un prince changé en bête aurait pu vivre là avec ses domestiques transformés en meubles, personne ne l'aurait remarqué). Les nouveaux propriétaires ont investi des sommes folles de leur poche pour remettre en état le château et transformer la forêt vierge qui l'entourait en jardin Renaissance, les travaux ont duré 5 ans, les touristes sont à nouveau les bienvenus, et la visite vaut vraiment la peine.
Le plus fou, dans cette histoire, c'est que le Château Gaillard n'appartenait pas exactement à n'importe qui : le château Renaissance a été construit sur ordre de Charles VIII, qui avait fait raser la forteresse médiévale existante après en avoir exproprié le fondateur (expropriation qui a probablement eu lieu depuis la plus haute fenêtre du donjon, d'ailleurs). Château Gaillard, c'est rien moins que le premier château avec jardins à l'italienne de France. C'est aussi là qu'un jardinier italien passé à la postérité, Dom Pacello, a réussi à acclimater les premiers orangers venus de Naples et créé la reine-claude. Et pour bien continuer la semaine des collections bizarres, les propriétaires ont rassemblé dans l'orangerie 60 des 62 espèces d'agrumes répertoriées dans le monde.
La visite guidée est passionnante et drôle, très riche en anecdotes historiques et sur les travaux pharaoniques qu'a nécessité le site. Le temps de la visite, on oublie totalement qu'on se trouve en ville, ce qui doit faire particulièrement plaisir à Dom Pacello, qui voulait faire de Château Gaillard un nouveau Jardin d'Eden. On joue à l'arbre généalogique des rois de France dans la salle des portraits, on essaie d'identifier les différents agrumes dans la grotte olfactive (zéro pointé pour nous ; mais depuis quand il y en a 62, aussi ?!) et on découvre des communs troglodytiques uniques en leur genre. Épique, donc. Vivement que tous les guides mentionnent le domaine, car tout ce travail mérite d'être récompensé et soutenu.
L'orage qui couve depuis ce matin éclate précisément alors que nous rejoignons la voiture. Timing parfait ! Après une journée aussi dense, il est plus que temps d'aller nous poser à l'hôtel. Nous attaquerons le crapahutage un peu plus tard demain matin, histoire de se rappeler que c'est quand même les vacances !
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