dimanche 18 août 2019

Copenhague, jour 4 - Le nord de la Seeland (Hillerød et Helsingør)

Ce matin, départ aux aurores pour le nord de la Seeland, c'est-à-dire la grosse île sur laquelle se trouve Copenhague. Il faut dire qu'entre notre hôtel et notre première étape du jour, il y a environ 1h30 de route de porte à porte, à raison d'environ un quart d'heure de métro, une petite heure de train et une bonne vingtaine de minutes de marche à pied, et nous voulons absolument être à Frederiksborg pour l'ouverture, à 10h.

Copenhague elle-même n'est pas vraiment à plaindre en matière de jolis châteaux, mais les deux plus intéressants sont à voir "hors les murs". On commence donc par Hillerød et son château de Frederiksborg – le Versailles danois, pour la version courte. Pour la version longue, il s'agit d'un château construit par Frédéric II en 1560, largement détruit par un incendie au 19e (c'est une vraie épidémie, dans ce pays !) et admirablement restauré par la suite. Je dirais bien qu'on n'y voit que du feu pendant la visite, mais on pourrait m'accuser de blagues faciles... Malgré son look Renaissance nordique, il est posé sur une île au milieu d'un lac, cerné par de sacrées douves en prime, et on doit franchir deux enceintes avant d'y accéder. Autant dire que les châteaux médiévaux sont jaloux.


L'accès à pied depuis la gare pourrait sembler un poil long, mais le paysage de carte postale, avec hérons et bébés canards inclus, compense largement. Dimanche à 10h du matin oblige, la messe est en cours dans la chapelle du château, ce qui signifie que nous n'y avons pas accès tout de suite et devrons y revenir plus tard. Mais ce n'est pas comme s'il n'y avait pas de quoi s'occuper tant que missa n'est pas : Frederiksborg est le plus grand château de Scandinavie et les salles impressionnantes couvertes de stuc et de tableaux s'enchaînent sur plusieurs étages. Les pièces sont meublées chronologiquement, un roi après l'autre, et les portraits suivent eux aussi l'évolution de la mode, des fraises aux robes à crinoline. L'avantage d'un pays qui n'a pas définitivement jeté sa monarchie aux orties au 19e siècle, c'est la galerie de portraits ultra-modernes située sous les combles, qui présente les politiciens danois les plus récents, la reine Margrethe II et son héritier de fils (on n'a pas retenu quel numéro il prendra, mais ce sera un Frédéric).


Nous ne sommes pas fâchés d'être arrivés à l'ouverture (même si nous avons dû nous priver de cannelle petit-déjeuner pour ça), car c'est la foule des grands jours et il faut parfois jouer des coudes dans les escaliers ou dans certaines pièces. Le summum des embouteillages est atteint dans ce qui est pourtant la plus grande pièce du château, le Grand Hall, avec ses plafonds en haut-relief, ses statues et ses portraits "de famille". Bon, il faut avouer que c'est un peu la classe et que la Galerie des Glaces n'a qu'à bien se tenir ! Une fois le grand tour terminé, retour à la case départ pour visiter la chapelle, qu'il aurait été dommage d'oublier tellement elle en met plein la vue. L'orgue en ébène, argent et ivoire y est peut-être pour quelque chose...

Le Grand Hall

Si Frederiksborg n'a pas grand-chose à envier à Versailles question histoire et déco, côté jardins, c'est France 1, Danemark 0. Bon, il faut reconnaître que nous n'avons de temps à consacrer qu'aux jardins baroques, et pas au reste du parc, mais ceux-ci sont un peu light quand on connaît la version Roi Soleil. La perspective sur le château est jolie, mais tout ça manque un peu de fontaines... voire de parterres, une partie d'entre eux étant manifestement en cours d'entretien/de replantage total. De l'autre côté des grilles se tient une espèce de foire artisanale qui nous permet de découvrir que les Danois sont sacrément doués en hydromel et en salami, et nous en profitons pour compenser notre absence de petit-déjeuner par un apéro improvisé.


De retour en ville, nous prenons le temps de nous poser pour déjeuner. Un peu trop, d'ailleurs : en regagnant la gare, nous voyons le train pour Helsingør nous passer sous le nez, et parce que c'est dimanche, il n'y en a qu'un par heure. Nous n'avons plus qu'à prendre notre mal en patience, ce qu'un peu de cannelle, de thé et de wi-fi facilite grandement.

Une heure d'attente et 25 minutes de train plus tard, nous voici finalement à Helsingør, que le monde entier connaît mieux sous le nom d'Elsinore (ou Elseneur pour les francophones). C'est en effet dans cette ville, et plus précisément au château de Kronborg, qu'un certain Barde anglais a situé une petite pièce pas connue du tout, Hamlet. De nos jours, le château est même connu quasi-exclusivement pour ça, et son passé de "poste-frontière" de la mer Baltique (à 4 petits kilomètres en face, c'est la Suède) puis de prison/forteresse militaire passe carrément à la trappe au profit de la tragédie mettant en scène Hamlet, Ophélie, Gertrude, Laërte et consorts. D'ailleurs, tous les ans en août, une troupe de théâtre investit les lieux et joue des scènes (un brin revisitées) de la pièce au beau milieu des touristes. Du sacré beau monde est d'ailleurs passé par là au fil des années, et on aimerait bien pouvoir remonter dans le temps et assister à la représentation donnée par Laurence Olivier et Vivien Leigh dans les années 30.



Pas de star hollywoodienne au casting cette année, mais une belle brochettes d'excellents acteurs qui vivent leurs personnages à fond. Nous arrivons pile à l'heure pour être menés par un Yorrick très en forme à un rendez-vous avec le fantôme du père de Hamlet dans un souterrain sombre et humide (le lieu idéal pour les fantômes, quoi), puis nous traversons les premières pièces du château au pas de course pour retrouver Hamlet et sa mère dans la galerie. Viennent ensuite la descente dans la folie d'Ophélie, un To be or not to be très inspiré, un excellent duel entre Hamlet et Laërte, et un final en apothéose où tout ce petit monde s'entretue joyeusement. L'essentiel de la pièce d'origine est là, mais ces scènes-clés ont été réécrites de façon plus moderne, histoire que tout le monde puisse en profiter sans avoir à se fouler un neurone en essayant de décrypter l'anglais élisabéthain. Les acteurs n'hésitent pas à prendre les visiteurs le public à partie, et surtout, tout est infiniment plus drôle que l'original. Même sans être de grands spécialistes, on est à peu près sûrs que Shakespeare n'a jamais fait dire à Hamlet : "C'est moi où il y a un mort sur ma table ?" juste avant son célèbre monologue. On ne sait pas ce que pense ce bon vieux Will de cette réécriture, mais nous, on adore ! Mention spéciale à un Yorrick vraiment hilarant qui aura conquis l'ensemble du public avec ses simagrées !



Une fois tous les personnages envoyés ad patres, il ne nous reste plus qu'à reprendre une visite plus traditionnelle dans les différentes pièces du château, dont la sobriété tranche un peu avec le luxe de Frederiksborg. L'avantage d'être arrivés tard, c'est que la plupart des visiteurs sont déjà partis. Nous avons ainsi Kronborg pratiquement pour nous tout seuls et on ne boude pas notre plaisir ! L'inconvénient, c'est que nous n'avons le temps de visiter "que" les appartements royaux, la tour des tapisseries et la chapelle avant que les employés du château ne commencent à jouer aux chiens de berger pour orienter les retardataires vers la sortie. Pas de casemates ou de tour du canon pour nous, donc, mais pas de regret : nous avons vécu les scènes les plus emblématiques de Hamlet en immersion totale et nous n'aurions pas pu rêver mieux !



Nous aurions pu prendre le temps de faire le tour du château pour essayer d'apercevoir la Suède de l'autre côté du détroit, mais il pleut à nouveau des cordes et l'idée d'une balade n'est pas très excitante. Nous préférons reprendre le chemin de la gare, d'autant que nous avons encore une petite heure de trajet devant nous pour rentrer à Copenhague. Mais cette petite excursion en Seeland aura été une bien belle manière de conclure notre séjour dans la capitale danoise !

Etre ou ne pas être ? Vous avez quatre heures...

Pour conclure, quelques-unes de nos observations sur Copenhague et les autochtones :
 Pour une capitale européenne, la ville est d'un calme irréel. L'absence de bruit est même assez inouïe quand on est habitué à Paris...
– Les rues sont extrêmement larges, les trains sont ponctuels, et surtout, tout est PROPRE. Léger choc culturel pour le Parisien en vacances, là encore...
– Le Danois aime le vélo. Et les voitures électriques. Et les transports en commun. Le Danois a tout compris à l'écologie et devrait être pris en exemple.
– Les Targaryen devaient être danois à la base, parce qu'il n'y a que dans ce pays qu'on croire des gens aussi incroyablement blonds...
– La langue danoise ressemble à un joyeux mélange d'anglais, d'allemand et de suédois (en même temps, quand on a conquis la moitié de l'Angleterre, ça laisse des traces dans le vocabulaire...). Avec deux-trois connaissances linguistiques et un peu de gymnastique mentale, on arrive à comprendre le sens global de phrases entières. Le genre de petit jeu dont je ne me lasse pas.
– Copenhague, il faut y aller. Tout simplement.

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