Ce matin, nous quittons Bangkok pour entamer notre petite exploration du pays. Nous en avons eu un petit aperçu lors du trajet depuis l'aéroport dimanche soir, mais la circulation dans cette ville est vraiment infernale à toute heure du jour et de la nuit. La moindre route est noire de monde (à l'heure de pointe, même les scooters avaient du mal à circuler sur la 2x5 voies à proximité de notre hôtel) et les feux tricolores sont interminables. Il n'est pas rare que l'on reste à l'arrêt cinq minutes montre en main avant que le feu ne passe au vert pour une durée de 90 secondes (il y a des compteurs au-dessus des feux, le chiffre est donc exact). Il nous faut donc deux fois plus de temps que prévu pour sortir de Bangkok, mais la conduite ne devient pas plus simple pour autant : entre les voies inutilisables pour cause de véhicules garés en double file, les scooters qui se croient dans Mario Kart, les conducteurs qui changent de voie (ou en inventent carrément) sans regarder autour d'eux avant et, sur l'autoroute, la bande d'arrêt d'urgence transformée en voie supplémentaire (parfois à contresens), il y a de quoi faire une crise cardiaque tous les 100 m. Enfin, pour la passagère seulement ; le conducteur est comme un poisson dans l'eau au bout d'une heure de ce régime et va jusqu'à qualifier l'expérience "d'amusante". On va dire que c'est le principal !
Avec tout ça, nous arrivons au Erawan Elephant Museum en toute fin de matinée, mais la température ayant un peu baissé, nous ne risquons pas de cuire à l'étuvée en nous baladant aux pires heures de la journée. Le thème de la journée sera "mégalo kitschouille", et cette première visite en est un merveilleux exemple : figurez-vous une statue de 44 m représentant un éléphant à trois têtes, ajoutez-y plein d'éléphants plus petits qui crachent de l'eau tout autour, saupoudrez de créatures mythologiques hindoues dans un cours d'eau, et vous aurez une bonne idée de ce à quoi ressemble ce truc. Entendons-nous bien, c'est très rigolo à découvrir et les opportunités de photos sont infinies, mais dieu que c'est clinquant... L'historique du lieu et la biographie du fondateur, fournis par l'audioguide, dégoulinent de mégalomanie et de bons sentiments ("la religion, c'est la clé de la paix sur terre" ; vous avez passé les 2000 dernières années sur une autre planète, mon bon monsieur ?), et les explications sont tellement longues qu'on finit par débrancher le machin pour profiter uniquement de la vue.
Si l'extérieur fait très parc d'attractions, avec ses statues pas possibles et ses "petits" éléphants qui barrissent quand on passe dessous (sauf un qui fait meuh, on ne sait pas pourquoi), l'intérieur a des airs de fantasme bollywoodien : l'escalier central brille tellement qu'on le verrait sans doute depuis l'ISS s'il était à ciel ouvert. A l'étage, dans le ventre d'Erawan, on trouve un temple dédié à Bouddha, avec des statues datant pour certaines du VIIIè siècle. C'est bien la seule chose dans cet endroit qui ne laisse pas de persistance rétinienne ! Malgré tout ça, la visite nous a beaucoup amusés. On ne fera pas ce genre de découverte tous les quatre matins, il faut bien l'avouer.
Vingt minutes de route plus loin se trouve Ancient City (Muang Borna dans le texte), que le panneau à l'entrée nous vend comme "le plus grand musée privé à ciel ouvert de l'humanité". Encore une fois, ça sent la mégalo à plein nez, mais c'est normal : le fondateur du parc, un milliardaire qui ne savait pas quoi faire de ses sous, est aussi celui qui a eu l'idée du musée éléphantesque. Tout s'explique... Sur une superficie de plusieurs dizaines d'hectares, le bonhomme a reconstitué (voire démonté et rapatrié) quelque 110 monuments de l'ancien royaume de Siam, à taille réelle ou au tiers quand l'original était vraiment trop grand. Et pour faire bonne mesure, il y a ajouté quelques œuvres originales (le plus souvent des sculptures, mais aussi quelques monuments), dont la kitschitude bat à plate couture celle de notre éléphant à trois têtes. En gros, c'est un peu comme France Miniatures, mais en Thaïlande. Et en grand.
Ça, c'est une oeuvre originale
Le parc est tellement vaste qu'il est impossible de l'explorer à pieds. Des voiturettes de golf sont disponibles à la location, mais ce mode de transport ne nous semble pas très pratique pour s'arrêter régulièrement. Nous préférons opter pour des vélos : l'effort physique ne sera pas énorme vu que les routes sont plates, et nous pourrons au moins profiter d'un peu d'air. Bon, les statues colorées qui ponctuent la visite valent ce qu'elles valent, mais en ce qui concerne les bâtiments, il faut reconnaître que le travail est assez spectaculaire. Pour avoir vu le vrai Grand Palais de Bangkok hier, on confirme que la réplique est sensationnelle (et contrairement à l'original, on peut entrer dedans !). La pièce maîtresse, le Sanphet Prasat d'Ayutthaya, est une véritable merveille, d'autant que l'original n'existe plus et que cette version a été construite à partir de documents d'archives. On apprécie aussi de se promener au milieu du village flottant et de déambuler dans le "jardin des dieux", dont les statues arrivent miraculeusement à échapper au kitsch.
Le Sanphet Prasat (toit noir) et le Grand Palais (toit rouge et vert)
Même en nous arrêtant seulement devant les monuments les plus impressionnants et sans écouter l'audioguide qui en fait des tartines, nous mettons un peu plus de deux heures à parcourir le parc. Encore une fois, c'est uniquement grâce au don de GPS humain de Benjamin que nous parvenons à voir la totalité des monuments (ou ceux qui sont bien présents ; il y a beaucoup de zones en travaux et certains sont en phase de reconstruction) ; seule, j'en aurais sans doute loupé la moitié... Heureusement que la chaleur est moins intense qu'hier, car la visite aurait sans douté été bien moins agréable sans cette couverture nuageuse bienvenue. Sur la fin, nous essuyons même une petite averse, à peine suffisante pour nous rafraîchir.
Comme pour Erawan Elephant Museum, ce n'est pas le genre de visite que nous referons de sitôt, et même si certaines œuvres laissent une impression durable (et négative) sur la rétine, l'ensemble mérite vraiment le détour.
Après l'effort, le réconfort de la clim : nous avons près de deux heures de route pour rejoindre Ayutthaya, notre étape pour ce soir. Deux heures de slalom et de libertés prises avec le code de la route, donc. On aurait bien aimé avoir des chiffres sur les accidents de la circulation dans le pays, mais bizarrement, le Routard n'en fournit pas...
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