dimanche 1 janvier 2017

Nouvel An au cercle polaire, jours 3 & 4 - Huskys, rennes et soirée crêpes

Le premier jour de 2017 est placé sous le signe des animaux ! Nous n'avons pas fait assez de photos depuis le début du séjour, il faut bien compenser quelque part... Après le petit-déjeuner et la désormais traditionnelle séance d'habillage de survie (le thermomètre annonce -20°, ce qui justifie bien de porter un bonnet par-dessus la cagoule), nous prenons le bus pour le chenil de huskys de Torassieppi, le plus grand d'Europe avec environ 400 toutous. Au programme de la matinée, initiation à la conduite d'un traîneau de chiens et safari d'une petite dizaine de kilomètres. Le traîneau, c'est plus simple que la motoneige : le musher s'occupe du frein et les chiens font le reste !



Un attelage se compose de six chiens : six boules d'énergie qui n'ont aucune patience, aboient à qui mieux mieux, se roulent dans la neige, se sautent à la gorge et s'emmêlent les pattes dans leur harnais. Autant dire qu'ils ont envie de partir en courant et que ça se sent. Ca tombe bien, c'est ce qu'on leur demande ! Benjamin est le premier à prendre la direction de l'attelage, histoire de juger de la difficulté de la manœuvre. Finalement, rien de bien compliqué une fois qu'on a appris à appuyer de tout son poids sur le frein pour empêcher les piles électriques sur pattes de dépasser les copains. C'est même tellement simple que nous échangeons nos places sur le traîneau à mi-parcours et que bibi termine la balade au "volant". Malgré le froid sévère, la neige qui tombe pour compléter le tableau et les arrêts très (voire trop) fréquents pour s'assurer que tout le monde suit, la balade au milieu des paysages enneigés et presque vierges est vraiment exceptionnelle. Nous sommes tombés sur des turbo-chiens qu'il faut retenir en permanence, y compris dans les montées, pour ne pas se faire embarquer jusqu'en Norvège. A chaque freinage, les deux chiens de tête se tournent vers nous et nous dévisagent d'un air à la fois déçu et agacé, que l'on traduit très facilement par : "Les humains sont de gros rabat-joie". Peut-être, mais au moins, nous ne sommes pas rentrés dans le traîneau de devant, nous n'avons pas versé dans le fossé et nous n'avons pas changé de pays sans nous en rendre compte !



Après cette belle balade qui nous aura pris beaucoup plus de temps que prévu (1h15 contre environ 45 minutes en temps normal), il est temps de passer au déjeuner. Les apprentis mushers qui auraient aimé récupérer leurs doigts et leurs orteils dans un restaurant chauffé en sont pour leurs frais, car ce midi, nous mangeons dans... un igloo. On a connu mieux pour se réchauffer, mais l'expérience vaut le détour ! Seuls les sièges sont en bois, tout le reste est à 100% composé de glace, y compris les plateaux de table. Les murs sont sculptés et les plus courageux peuvent même choisir d'y passer la nuit. J'en connais qui ont réussi à geler en camping en Bretagne en plein mois d'août, donc merci, mais non merci... En revanche, le déjeuner ne pose pas de problème particulier, à condition d'éviter de poser son assiette ou son verre de meru (du jus d'airelles chauffé) sur la table et de remettre les mains dans les moufles entre deux services. Au menu, ragoût de pommes de terre aux rennes. On n'allait pas manger des hamburgers dans un igloo, quand même !



Le repas avalé, nous n'avons que 500 mètres à parcourir à pied pour accéder à la ferme de rennes de Torassieppi, classé au patrimoine mondial de l'Unesco car il s'agit d'une des rares habitations de Laponie à ne pas avoir été détruite par les Allemands en 1944 (le IIIè Reich n'a pas apprécié que son allié finlandais se permette de signer une paix séparée avec la Russie après leur tentative d'invasion ratée). Le renne, c'est un peu le couteau suisse (ou le cochon, ça dépend du point de vue) des Lapons : la viande, les os, la peau, les bois, les sabots, TOUT sert. Sans rennes, la vie est Laponie aurait été impossible. D'ailleurs, pour la minute culture, les motoneiges ne les ont remplacés pour le transport qu'à la fin des années 1960. Quant aux raquettes et aux huskys, ce sont des importations récentes destinées aux touristes, les Lapons préférant les skis de forêt quand il faut impérativement se déplacer sur leurs propres pattes.



La visite commence par un rapide tour en traîneau tiré par un renne autour de ce qui doit être une espèce de paddock en été mais ressemble juste à une grosse galette de neige en ce premier jour de 2017. Heureusement que nous sommes protégés par une grosse couverture (qui n'aurait d'ailleurs pas été de trop pendant le safari en chiens), parce qu'à la vitesse où avancent les quadrupèdes, on a le temps d'attraper la mort. On espère que ça avance mieux quand il s'agit de transporter le Père Noël ! Le temps que l'ensemble du groupe fasse son petit tour (il n'y a que 5 traîneaux sur lesquels on peut monter à deux), nous allons faire plus ample connaissance avec les rennes qui paissent bien sagement dans leur enclos. Rudolph, Tornade, Comète et Cupidon sont peut-être très doués pour trouver de quoi manger sous un mètre de neige, mais quand les humains viennent leur apporter un petit extra, personne ne fait la fine bouche. On a testé pour vous, le poil de renne est tellement épais et dru qu'on peut y enfoncer les doigts jusqu'à la deuxième phalange. Il faut bien ça pour résister à 6 mois d'hiver dans la région !




Suite de la visite avec le corps de ferme, qui ressemble à tous ses homologues du monde à l'exception des costumes traditionnels lapons accrochés au mur. Les pièces sont grandes et chaleureuses, avec leur ameublement et leurs outils d'époque, mais s'ils devaient passer leur hiver calfeutrés là-dedans, les habitants devaient avoir le temps de devenir claustrophobes. De l'autre côté de la cour, un petit musée expose les outils utilisés par les Samis (les Lapons d'origine, présents dans le coin depuis environ 15 000 ans, ceux qui ont les yeux bridés et que les Finlandais ont allègrement envahis et persécutés, façon Indiens d'Amérique) et les éleveurs modernes pour s'occuper des rennes et survivre à l'hiver. C'est l'occasion d'une formation accélérée, dispensée par Juha, sur l'élevage de rennes, les prédateurs naturels du bestiau (glouton, ours, loup et aigle) et les différentes façons de l'accommoder. Tout ça est très exotique pour des touristes français, jusqu'à ce que le très pragmatique Juha fasse un parallèle avec les vaches normandes. Tout de suite, ça perd en glamour...




La nuit commence à tomber (même si, au rythme où elle va, elle ne risque pas de se faire mal) et il faut déjà rentrer à l'hôtel. Il faut avouer que passer cinq heures dans le froid n'est pas de tout repos et que nous ne sommes pas fâchés de retrouver notre chambre et son radiateur. Pour nous détendre un peu, nous allons faire un petit tour dans le sauna à pierres traditionnel. Vraiment petit, le tour : il fait 75° à l'étage, à peine moins en bas, et on comprend ce que doit ressentir un saumon en train de griller sur son feu de bois. Benjamin tente vaillamment de se plier à la coutume locale, à savoir plonger dans le lac après avoir bien transpiré (2°, bonjour le choc thermique !), mais même pour lui, l'expérience est trop rude. Inutile de préciser que je n'ai même pas essayé... Quelques coupes de champagne gracieusement offertes par le tour opérateur nous attendent à côté du spa, mais nous sommes pratiquement les seuls présents et les accompagnateurs menacent de mettre les flûtes non consommées à la poubelle. Alors on se dévoue pour les finir, parce que gaspiller du champagne un 1er janvier, c'est un crime. Autant dire qu'il n'aurait vraiment pas fallu plonger dans le lac après ça !

Pour donner à ce séjour un tout petit côté culturel, et pas seulement touristique, nous rejoignons le pub en fin d'après-midi pour un diaporama composé de photos prises par le frère, photographe professionnel et ami des Samis, de l'un des guides. On y découvre la faune lapone et la vie des Samis au fil des saisons, à travers des photos à la fois sublimes (parce que les photographes animaliers sont vraiment trop forts) et déprimantes (parce que je ne ferai jamais aussi bien). Le commentaire nous apprend entre autres que maman renne peut retarder la formation de bébé renne de deux mois s'il fait froid ou s'il n'y a pas assez à manger, que la sterne arctique parcourt 70 000 km par an en migration et que le glouton peut tuer 24 rennes en une seule nuit rien que pour épater une femelle. Ça peut toujours servir pour un Trivial Pursuit.



Et pour conclure le voyage avec l'art et la manière, le dîner s'ouvre par des entrées traditionnelles (renne, saumon et poissons fumés) et se termine dans un kota au bord du lac, avec des crêpes cuites au feu de bois. L'idéal aurait été de profiter d'une dernière aurore boréale, mais il a neigé toute la journée et le ciel reste bien bouché. On ne peut pas tout avoir et le reste du programme était déjà très satisfaisant !

Les amis des animaux sont de retour !

Le jour 4 est consacré à la restitution de l'équipement grand froid et au retour sur Paris (où il fait actuellement 0°, autant dire les grosses chaleurs après quatre jours passés à moins beaucoup). Rien de bien palpitant à raconter, donc, et il faut déjà penser à conclure le récit de ce séjour. Nous espérions du dépaysement en réservant notre package auprès du tour opérateur et le moins qu'on puisse dire, c'est que nous avons été servis ! Passer le Nouvel An sur la Lune n'aurait sans doute pas été plus exotique. Si nous n'avions qu'un souvenir à ramener avec nous, ce serait évidemment les aurores boréales, que l'on peut désormais rayer de notre liste de choses à faire/voir dans notre vie. Un voyage très court mais très riche en expériences incroyables que nous ne sommes pas prêts de refaire de sitôt.

Pour ceux qui voudraient faire exactement la même chose, il suffit de se rendre sur le site de Vivatours. Nous n'avons rien à y gagner, mais quand un voyage est aussi mémorable, il faut partager les bons plans !

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