vendredi 22 avril 2016

Bulgarie, jour 3 - Koprivshtitsa & Etara

Après un petit-déjeuner bulgare tout ce qu'il y a de plus traditionnel à base d’œuf dur, de tomate, de concombre, de jambon et de siréné (c'est comme de la féta, mais avec un supplément de sel), nous commençons nos visites hautement culturelles du jour. Pour situer un peu, il va falloir faire une grosse minute culture, mais comme je n'en ai pas fait hier, j'ai le droit.

Koprivshtitsa compte moins de 3 000 habitants et on ne saurait même pas le placer sur la carte de Bulgarie, mais c'est malgré tout une ville très importante dans l'histoire du pays, car c'est là qu'a été tiré le tout premier coup de feu de l'insurrection bulgare d'avril 1876, qui allait mener à l'indépendance deux ans plus tard. La Bulgarie, c'est un peu comme Malte : c'est le genre de pays qui a appartenu à tout le monde avant de s'appartenir tout seul. Avant les Russes, c'est l'Empire ottoman qui avait la main dessus. La situation étant loin de plaire à tout le monde, boum, on complote et on se soulève. En gros, c'est un peu comme si le soulèvement de Pâques 1916 en Irlande avait commencé dans un obscur village perdu dans la montagne plutôt qu'à Dublin : le village serait resté dans les mémoires et on y visiterait les maisons des insurgés. Et bien c'est exactement ce que nous allons faire aujourd'hui.

L'insurrection (que les Bulgares appellent carrément "la révolution") a commencé à Koprivshtitsa le 20 avril 1876. J'aimerais dire que c'était fait exprès, que j'avais tout prévu en préparant le programme... mais en fait non. C'est un heureux hasard qui nous a conduits ici le 22 avril 2016, date à laquelle le village a organisé une commémoration, avec discours officiels, gens en costumes d'époque et petit détachement de militaires. Autant dire qu'on est carrément dans l'ambiance.



Grâce à Pierre et à ses notions de bulgare, nous parvenons à acheter des billets combinés pour les six maisons-musées de la ville à une dame qui ne parle pas un mot d'anglais. Nous en visiterons cinq. En vrac et sans entrer dans les détails, on découvre la maison d'un poète local mort pendant la Première Guerre mondiale, deux maisons de révolutionnaires, l'ancienne école (qui fut un temps la plus moderne de Bulgarie) et la maison d'un riche marchand. La plupart des expositions sont un peu obscures pour nous, car il nous manque à peu près toutes les bases de l'histoire bulgare, mais les reconstitutions sont intéressantes et les maisons elles-mêmes, restées dans leur jus 19è siècle, sont très jolies. Journée commémorative oblige, nous sommes suivis à la trace par des groupes de militaires qui ont décidé de visiter les mêmes lieux que nous, dans le même ordre...


Chez Todor Kableshkov, héros de l'insurrection


Les photos à l'intérieur des maisons ne sont possibles que moyennant finance, mais nous décidons que ça n'en vaut pas la peine. Nous faisons une exception pour l'église Sveta Bogoroditsa, toute bleue dehors et toute dorée dedans, construite à l'emplacement d'une ancienne église détruite par les Turcs parce qu'elle était plus grande que la mosquée du coin... L'art orthodoxe dans toute sa gloire, tout en fresques et en icônes qui brillent. Eglises catholiques baroques et églises orthodoxes, même combat !



Pour poursuivre notre thématique "Renaissance nationale bulgare" (traduisez : milieu du 19è siècle), nous prenons ensuite la route d'Etara, connu pour son musée ethnographique en plein air. Ce n'est pas la porte à côté (près de 2h30 de route), mais les paysages que nous traversons sont vraiment sublimes. La montagne couverte d'arbres, c'est beau quel que soit le pays... A plus de mi-parcours, nous sommes attirés tels des pies par une flèche toute blanche et un gros dôme qui brille à flanc de montagne. Le guide n'en fait absolument pas mention et les panneaux indicateurs ne se bousculent pas au portillon ; il faut acheter un droit de photo à l'intérieur et recevoir un petit ticket pour découvrir qu'il s'agit du monastère de la Nativité de Shipka, aussi appelée "église-mémorial". Dedans, c'est comme à Koprivshtitsa, en mieux (il suffirait de fondre deux icônes pour régler la dette du pays). Dehors, c'est... waouh. Tout ce blanc et ce bling, ça impressionne son touriste. D'après Wikipédia, l'endroit est dédié aux soldats russes, bulgares et ukrainiens morts pour la libération de la Bulgarie pendant la guerre russo-turque de 1877-78. C'est beau, on continue la thématique sans même le savoir...



Maintenant que nous nous sommes bien dégourdi les jambes, nous poussons jusqu'à Etara sans plus d'interruption. Le fameux musée ethnographique mentionné plus haut est l'un des musées les plus visités du pays et reconstitue l'architecture et la vie artisanale traditionnelles bulgares du 19è. C'est le genre de visite qui s'accorde parfaitement au temps qu'il fait : ciel bleu et grand soleil, mais sans les 40° à l'ombre de la période estivale. Le village est construit autour d'un cours d'eau qui permet à la moitié des échoppes d'artisan (du moulin au fabricant de cordes, en passant par le tanneur) de fonctionner. Le rez-de-chaussée des maisons en souvent occupé par une boutique moderne, tandis que l'étage reconstitue des ateliers et des pièces de vie d'époque. C'est d'un chou absolu et le cadre est encore une fois superbe.



Dernière étape, un peu plus haut dans la montagne, le monastère Sokolski. Comme celui d'hier à Sofia, on y vient pour l'atmosphère et le calme incroyable qui y règne. Ce genre de monastère étant encore en activité, on ne peut évidemment pas visiter l'intérieur et il faut se contenter des jardins (du cloître ? pas très sûre de la terminologie dans un lieu de culte orthodoxe..). Ici, il y a en prime une petite église bleue avec de belles fresques et une fontaine qui glougloute au milieu du jardin. L'endroit est perdu dans la montagne, et en dehors des oiseaux, il n'y a pas un bruit. Tranquillité et recueillement assurés.



Encore un peu de voiture pour finir la journée : ce soir, nous faisons étape à Veliko Tarnovo, ancienne capitale de la Bulgarie médiévale, dans un hôtel de charme qui nous offre une très belle vue sur la forteresse. On a connu pire !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire